Kétamine et massage 



Nous nous étions donné rendez-vous à l’entrée du bois de Vincennes, dans le sud-est de Paris. Moi, j’étais crevé par toute cette drogue que je consomme quotidiennement. Elle est arrivée rayonnante, longs cheveux roux caressant ses épaules fines et surplombant son corps anorexique. Elle m’a souri et j’étais déjà très perturbé. Ça faisait si longtemps qu’une fille, à fortiori aussi belle qu'Irina, ne m’avait pas souri. Irina, c’est ce canon de beauté russe que j’avais connu au lycée et que je n’avais plus revu depuis dix ans. J’avais vu passer quelques photos d’elle nue sur Facebook pendant cette décennie, elle était devenue mannequin pour différents artistes, exhibant sa maigreur et son visage anguleux à mâchoire carrée. J’ai toujours aimé les rousses, c’était bien mon genre de meuf.

Irina m’a raconté son parcours depuis le lycée, j’étais sans voix. Je l’avais connue accro au subutex et vivant dans un centre psychiatrique à dix-sept ans. Elle était depuis devenue une femme émancipée. Elle avait beaucoup voyagé, c’était son truc. Toujours en transition, toujours en errement, jamais territorialisée. Elle avait voyagé et vécu partout, en Inde d’abord pendant longtemps, puis au Laos, en Thaïlande et au Cambodge, Et puis elle a traversé le monde pour s’installer en Uruguay, puis au Mexique et enfin aux États-Unis, dans l’État de Californie dans lequel elle avait trouvé un poste dans la culture de beuh légale. Elle a acheté deux camions, pour s’aménager un deux-pièces. J’étais fasciné.

Fasciné.

Quel était-il mon palmarès à moi ? Avoir zoné dans les soirées les plus clandestines de la capitale, quelques escapades pour me battre avec la police dans divers endroits de France, une semaine de prison à Athènes…

Nous nous étions donné rendez-vous à l’entrée du bois de Vincennes, dans le sud-est de Paris. Pour gagner sa vie et pouvoir voyager, Irina multipliait les petits boulots. Elle était modèle nue, masseuse et vendeuse de kétamine. Nous étions allongés dans l’herbe à peine humide d’une fin d’après midi de printemps. Elle nous fait deux grosses traces de . C’était doux. Elle était d’une beauté extravagante. Elle m’a dit de me mettre sur le ventre et d’enlever mon t-shirt, ce que j’ai fait immédiatement. Et là.. J’ai compris ce que voulait dire un massage. On m’en avait déjà fait, mais jamais comme ça. Elle avait été formée en Inde. Elle suivait le long de ma colonne vertébrale sans jamais la toucher, insistant là où il y avait des noeuds ou des torsions. J'étais tout entortillé. Pétris. Ratatiné. La tête dans les épaules et les épaules dans le ventre. Elle m'a libéré. J'ai failli devenir mystique et j'ai compris ce que certains entendent comme "énergies qui nous traversent". J’étais en transe.

La kétamine et ses mains me rendaient fous.

Je ne la reverrai plus pendant longtemps, la voilà repartie au Cambodge.

Merci Irina.

Catégorie : Carnet de bord - 31 août 2023 à  00:47

#kétamine #massage #voyage



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