Bonjour,
je vous met cet article d'un média de Toulouse pour lequel j'ai été interviewé. Il parle de Psychoactif. Il est interessant car il aborde notamment le
deep web et aussi le fait que le confinement à prouvé que les usagers n'ont pas à aller tout les 15 jours ou tout les mois voir leur médecin pour avoir leur
TSO. Ils pourraient tres bien y aller que tout les 3 mois par exemple !
L’impact inattendu du confinement sur les usagers de droguesLe confinement a bouleversé la consommation de drogues et la prévention des addictions. Parfois avec des conséquences graves pour les personnes les plus fragiles, mais aussi avec des impacts positifs pour les usagers et les structures d’accompagnement.
Par Caroline Carissoni - 1 juin 2020
Qu’est-ce qu’on garde ? Qu’est-ce qu’on jette ? L’écosystème de la drogue et des personnes en addiction tire lui aussi les leçons du Covid. Pour les consommateurs de
cannabis, d’opiacés ou autres
psychotropes, la période de confinement a été à double tranchant.
Le manque de produit ou la surconsommation, selon les cas, ont pu aggraver des souffrances psychiques ou psychologiques et les plus fragiles et les plus précaires ont parfois été privés d’aide. Les structures médico?sociales ont dû se réorganiser pour s’adapter aux contraintes sanitaires et le service addictologie du CHU de Toulouse a réduit son activité de 70 % pour réserver des places aux éventuels patients Covid . La période a également eu des effets positifs : certains usagers ont profité du confinement pour décrocher, tandis que les prises en charge et le suivi ont évolué.
Repérer de nouveaux patients, renforcer les liens avec les usagersDans l’urgence de la crise, les relais ont bien fonctionné. Les numéros d’appel type
Tabac?Alcool?Drogues info service, le CHU ou le bouche?à?oreille ont renvoyé les demandeurs vers les structures d’aide. « Cela nous a permis d’identifier et d’aider des personnes jusqu’alors isolées », se félicite Martine Lacoste, directrice de l’association Clémence Isaure qui gère à Toulouse des centres d’accueil et de soins (
CSAPA et
Caarud ), des hébergements thérapeutiques et de réinsertion. « Par ailleurs, témoigne?t?elle, la crise a considérablement renforcé les liens avec les personnes que nous suivions déjà. Elles se sont saisies des moyens d’accompagnement mis en œuvre, par téléphone ou de visu/visio, et ont apprécié de voir que nous répondions présents. »
« L’écoute à distance n’est pas la mieux adaptée, mais elle a montré qu’elle pouvait sauver des situations critiques ou consolider un suivi », reconnaît pour sa part Guillaume Sudérie, directeur du CREAI Occitanie, l’observatoire régional de la santé. Au cas par cas, les professionnels envisagent donc de prolonger cette pratique.
Un accès facilité aux traitements de substitutionDurant le confinement, l’accès aux traitements de
substitution aux
opiacés (TSO) a été facilité. L’autorisation de délivrer de la
méthadone en urgence, administrée sur place, a été élargie à plusieurs structures en France. Auparavant, seuls quelques
Caarud*, dont le toulousain Intermède, géré par l’association Clémence Isaure, y étaient autorisés.
« La fréquentation d’ Intermède a augmenté d’environ 10 % en mars?avril, estime Martine Lacoste. Des personnes en rupture de produit sont venues pour avoir accès à un substitut et ne pas consommer n’importe quoi. » Parallèlement, le renouvellement automatique des ordonnances de
méthadone et de
buprénorphine (Subutex) a été autorisé en France. Une initiative applaudie par les usagers, car la plupart d’entre eux ne fréquentent pas les centres d’accueil et de soin. « Ce drame collectif que nous vivons peut être l’occasion de mettre en exergue toutes les potentialités du système français de prescription de
TSO, qui est l’un, si ce n’est le plus libéral du monde », se félicite ainsi l’association d’usagers Asud.
Des usagers davantage connectés et mieux informésLes réseaux d’échange et d’entraide entre consommateurs de drogues et d’alcool ont vu leur fréquentation augmenter. Le site web psychoactif.fr, qui revendique près d’un 1 million de visites mensuelles en temps normal, a enregistré jusqu’à 20 % de visiteurs en plus pendant le confinement, selon Pierre Chappard, son président. « De nouveaux visiteurs qui ne trouvaient plus leur plan ou leur traitement de
substitution aux
opiacés se sont connectés pour échanger sur la pénurie et les plans alternatifs », relate?t?il.
« Ce type de forums alerte notamment sur certains produits ou certaines pratiques à risque, détaille Frédéric Gabanou, directeur adjoint du pôle soin et prévention de l’association toulousaine Arpade. La hausse de la fréquentation des réseaux sociaux, comme celle des centres, élargit la diffusion des messages de
réduction des risques. »
Approvisionnement sécurisé sur le Dark webComme pour tout autre produit de consommation, l’achat en ligne a augmenté. Sur le forum psychoactif.fr, les questions sur le Dark web ont plus que doublé durant le confinement. « Cette pratique présente l’avantage d’être plus sûre, évite d’aller dans les cités, de s’exposer à la police », argumente Pierre Chappard. « On trouve sur le Net un choix conséquent et de qualité bien meilleure que dans la rue. » Les arnaques et le risque de consommer des produits peu fiables, donc dangereux, existent, mais la surveillance et les commentaires clients permettraient de garantir la qualité du service et des produits. Cela s’est aussi révélé une garantie d’approvisionnement et de prix, alors que certains lieux de vente étaient tendus.
Distribution d’antidote aux surdosesSi des usagers ont augmenté leur consommation de produits psychoactifs et/ou d’alcool, le plus souvent pour contrer l’angoisse de la pandémie ou combler l’ennui, d’autres ont réduit ou stoppé leur consommation. C’est à la fois une bonne nouvelle et une source d’inquiétude. « La réduction de la consommation ou la consommation de produits de moins bonne qualité diminue la tolérance au produit, explique Nicolas Franchitto, professeur d’addictologie au CHU Toulouse. Le retour à des produits plus fortement dosés ou une surconsommation pour rattraper le retard, par crainte de nouveau manque, peuvent provoquer des surdoses fatales. »
Pour éviter une vague de surdose après le déconfinement, une campagne d’information et de distribution de
Naloxone, antidote aux overdoses d’opiacés jusqu’alors peu distribué en France, a été lancée. Les centres médico?sociaux distribuent des kits et les pharmacies sont invitées à s’approvisionner. Fin mai, le service addictologie du CHU n’enregistrait pas de cas d’overdose. « Mais nous ne sommes pas à l’abri, se réservait le Professeur Franchitto. L’important c’est d’être prêt. » Au CHU aussi, les stocks de
Naloxone sont pleins.
Changer le regard sur les usagers ?Cette crise témoigne finalement des paradoxes du système français dans l’approche des drogues et des pratiques addictives. « Le système français est un mélange de lois répressives et progressives, reconnaît Guillaume Sudérie. Il allie une réglementation punitive et un système de soin très performant, accessible à condition que l’usager soit dans une démarche de réduction, très contrôlée. » Pierre Chappard s’interroge : « Est?ce qu’on a vraiment besoin de renouveler une ordonnance de
TSO tous les mois ou tous les 15 jours en présentiel ? L’accès pourrait être facilité et inciter ainsi le recours au traitement ». Et de plaider : « Cette crise a démontré que les usagers étaient responsables ». Reste à savoir si cela sera entendu.
Source :
https://www.mediacites.fr/enquete/toulo … e-drogues/