De la came aux femmes, le fou prend la dame! Décro et libido

Catégorie : Tranche de vie
08 juin 2019 à  20:07

#drague #héroïne #sexe
Un beau jour, j’ai levé la tête de dessus mes bras déchiquetés.
Et j’ai redécouvert le monde autour.

En été, assis sur un banc, dans mon quartier pourri, je me suis mis à regarder les enfants jouer.
J’étais hypersensible, comme nu, sans ma peau, faussement dure, mais trouée de piqures.

C’est comme être poreux à toutes les émotions, capter la lumière en tri CCD. On peut, dans cet état, tout poil du corps hérissé, crampes encore supportables, s’émouvoir pour un envol de pigeon, un sourire de petit garçon.

Et là, au bout de ma rue, j’étais mal, mais, je savais que, j’avais vu la lumière sous la porte.

Il y avait trop longtemps que j’avais des œillères,
on dit, chacun croyant avoir trouvé le «bon mot», que la came isole, de force. C’est vrai.

Des années de solitude totale, à ne fréquenter que les homies, plus les amis. Trop honte.
Vivre dans des squats, des caves, des piaules de quartiers minables, mais que j’aimais.

Surtout, pendant quatre ans, je n’ai eu aucune relation sentimentale, ni sexuelle, rien.
Ma femme, c’était la came. Quand j’aurai, plus tard, inespéré, une femme, légale, l’héroïne sera une maîtresse, plus ou moins exigeante, et la cocaïne, une très onéreuse danseuse.

On peut rivaliser avec une autre femme, disait ma femme, pas avec la came.

On avoue ou  ne lâche rien, le pardon ne peut pas être, ou alors, au prix de la confiance. L’épouse infirmière, oui, mais qui voudrait d’une femme flic?
Ou d’un mari qu’on peut trouver mort, en rentrant, chaque soir, une pompe dans le bras? Pire, sur le trottoir.

L’ancien toxico est héroïque, le toxico en action, pathétique, diabolique. On avait peur de moi. Dur à comprendre pour ma pomme.
 
Enfin, je n’avais pas regardé. autour de moi, depuis je ne sais combien. Et je vis la vie, au milieu de laquelle j’évoluais comme un aveugle, tiré par un rotweiler renifleur. Je l’appelais Kraving.

Je ne m’étais vu dans le miroir que défoncé, le matin, pour faire mon nœud de cravate. Le costume cravate est très pratique pour l’injecteur, poches à gogo, et garrot.

Un jour je me vois dans la glace, en manque, et je suis tellement moche, que j’en aurais pleuré. C’est moi ça?

Loin de me donner l’impulsion pour arrêter, au contraire, cela exacerba le besoin de prendre une ligne, pour se recomposer. Se supporter, ne pas se sentir misérable.
Je ne voyais même plus la misère sociale, dans laquelle nous baignons, moi, ma mère, mon frère.

Enfin, j’ai eu un vrai logement et ça a tout changé. La première période stable de ma vie.
Mon travail ne se faisait plus en costard, mais en bleu de chauffe, blouse, et casquette à la marin.
Je relevais les compteurs d’eau sur toute la rive droite de Paris. J’avais donc les clefs et codes de tous les bâtiments. Le nombre d’endroits tranquilles, pour se shooter…
Mais, de moins en moins souvent.
Le truc n’est surtout pas de serrer les dents, plus on force, plus on craque.
Au contraire, laisser passer les envies, et se construire une vie, petit à petit, qui soit et ce n’est pas dur, gagnante en concurrence de l’horloge toxicomane, la vie au rythme des cycles opioïdes courts.

Ce n’est pas pour les conséquences qu’on s’abstient de se trouer la peau, mais parce qu’on a mieux à faire. C’est progressif, bien sur, et ne marche que si on a des centres d’intérêt. Ce qui est loin d’être le cas de tous les «résilients», c’est bien le problème.

Au début, quand on a fait que courir après l’argent de la came, qu'on a plus besoin de pécho, on ne voit même plus l’intérêt de travailler. Pourquoi, quand 99% de votre salaire payait la poudre. On est décalé.
Mais, quand le premier mois, j’ai eu mon salaire et du payer un loyer, tout à changé. Ma priorité n’était la came que le jour de paie, les suivants paieraient les factures.

Mon nouveau travail était physique,
Tout ça pour dire que j’ai repris douze kilos, passant de 63 à 75.

C’est là que j’ai compris, les filles me mataient. Je n’avais jamais remarqué, elles regardent, discrètes, quand tu regardes ailleurs. Mes amis me disaient qu’elles se donnaient des coups de coude quand j’arrivais etc.

Mais je n’y ai jamais cru.

A Belle-île en mer, j’ai bien vu que la plus jolie (pour moi) du fest noz, était focalisée sur ma tête. Et on s'est trouvé, pour la soirée. Après quatre ans sans, vous imaginez.

J’avais ce visage, comme figé dans sa jeunesse, cristallisé, sans age, qu’ont souvent les camés à l’héro, quand ils stoppent à trente ans. Leurs traits sont, comme restés ceux du moment où ils ont commencé.
On est comme stupéfait. Et les rides d’expressions sont moindres, l’effet de l’opiacé donnant un masque, car on est dans un état «neutre», peu de sourires, congelé, comme la vie arrêtée.

Réveillé, on a l’impression de revivre.

La libido, oubliée depuis des années, resurgit, aussi, par le désir des femmes. J’étais donc désirable?
Attention, ce fut progressif, les toutes premières fois n’étaient pas glorieuses. Mais je reprenais confiance, car dans les yeux de ses filles, je n’étais pas un junki, mais un minet! Moi, l’ancien punk, un petit playboy?

Avec mon teint halé de navigateur, mes petits biceps (à l’époque…), j’avais belle allure, en tout cas j’avais un sex-appeal que je ne me connaissais pas.

Une histoire (de vantard, mais vu ma vie pitoyable sur ce plan, je peux me permettre de contre balancer dix ans de solitude avec deux ou trois faits glorieux), m’a bien confirmé cela.

Un soir, dans un bar, seul, j’observe deux filles. En fait tous les hommes du bistrot sont tous scotchés sur elles.
Et, prenant son courage à deux mains, un gars tente sa chance.
Je suis impressionné car dans mon pays, on est timide et la drague est loin d’être un sport national.
Il n’ a pas le temps de dire trois mots, qu’il est éconduit avec mépris.
Il faut dire que ces deux filles de 22 ans sont vraiment canons. Et tout excitées, sont-elles là pour draguer ou pour allumer?
Après le premier, un autre homme, pas découragé, risque sa fierté, qu’il doit ravaler vite fait.

Jamais deux sans trois. C’est fou le succès qu’elles ont. Quand on pose les yeux sur elles-deux on ne peut plus les enlever.

Elles ont viré trois vaillants prétendants, et pourtant, vaillant (bourré, normal en Bretagne) je me dis, «t’as vu leurs approches de merde, fais tout le contraire».
En me levant, je sais, que je n’ai pas de phrase toute faite ou d’autre approche et qu’il ne faut pas penser.

Bonsoir je m’appelle Ismaël et vous?

C’est tout, une minute après, j’en avais une sur chaque cuisse. Très chaudes les miss monde.
Un blonde, style Marilyn, habillée en rose, son corps parfait, emballé comme un bonbon. L’autre est brune, sexy aussi et, choisir sur le physique, ne serait pas judicieux et impossible  (sauf si on aime les blondes).
La brunette commence à frotter son entrejambe sur mon genou, de façon ostentatoire. On dirait que c’est parti pour un plan à trois, trop pour moi, la blonde m’embrasse déjà…

Tous les mecs du bar sont verts, humiliés dans leur virilité, par un blondinet, qui, en plus, n'a rien dit.

J’avais confiance en moi, et elles l’ont senti, quand les autres s’attendent  à un refus, pas moi.
Au pire, j’aurais un sourire.
Et de me voir en un minute, assis avec les deux canons, qui m’enlacent, comme pour les narguer, les a scié sur place. Et moi aussi!

Un petit exploit. J’ai, bien sur, ramené la blonde.  Comment je me la pète..La plus belle femme que j’ai touché, dans toute ma vie.

Ce ne fut, par contre, pas la gloire au plumard. Mais ça allait suivre. Plus je séduisais, plus j’attirais les femmes, cercle vertueux. La confiance revient petit à petit. Chaque fille est différente, au lit aussi. Il n’y pas de bons coups, mais de bonnes connexions.
Enfin, les femmes parlent entre elles...Et, au début, cela ne devait pas être en bien.

Rentré à Paris, en septembre, je faisais un carnage chez les étudiantes et tout ce qui portait jupons sur le canal St Martin. Mon spot, avec Paris plage.

Vous l’avez compris, je suis devenu un vrai dragueur. Mais attention, dans une philosophie du partage, et sans le côté macho. Conquérir pour posséder, non, rencontrer et échanger, le truc c’est que beaucoup de filles sont moins féministes que moi!


Quand j’ai ouvert les yeux, sur le trottoir, les bottes en cuir des femmes pressées, avaient maintenant des corps, des visages et des regards. Et puis, si  je les (re)découvrais, elles aussi, qui, hier, passaient à côté sans me calculer (ou même me voir, de profil..), me mataient maintenant. Avec gourmandise, parfois, me faisant m’aimer, pour la première fois depuis longtemps.

J’étais Narcisse, apprenant l’amour, de soi, dans le reflet des iris féminins, des pupilles dilatées par le désir.


Dame, ça valait le coup d’arrêter la came!

Dernière modification par ismael77 (08 juin 2019 à  22:37)



Commentaires
#1
janis
Adhérent PsychoACTIF
08 juin 2019 à  22:22
Hello,

J'ai passé un bon moment à te lire.
Si je ne devais retenir qu un passage ce serait celui où tu expliques l arrêt progressif, sans pression, juste parce que finalement tu as autre chose a faire.


ismael77 a écrit

Quand j’ai ouvert les yeux, sur le trottoir, les bottes en cuir des femmes pressées, avaient maintenant des corps, des visages et des regards. Et puis, si  je les (re)découvrais, elles aussi, qui, hier, passaient à côté sans me calculer (ou même me voir, de profil..), me mataient maintenant. Avec gourmandise, parfois, me faisant m’aimer, pour la première fois depuis longtemps.

J’étais Narcisse, apprenant l’amour, de soi, dans le reflet des iris féminins, des pupilles dilatées par le désir.


Dame, ça valait le coup d’arrêter la came!

C'est marrant ... moi c'est exactement l'inverse.. C'est grâce à la came (en qauntité modérée) que je vois les autres...
Beau texte comme d'hab, Ismaël.


#3
ismael77
Adhérent PsychoACTIF
09 juin 2019 à  08:31
Merci, il y a la suite, déjà écrite, il n'y avait pas encore le climax, là. Le sad/happy ending.
Mais je ne la mettrai que si ça intéresse, car c'est déjà (trop) long. J'ai trop à dire. Faut que je synthétise.

Même là, en commentaire, comment me taire (je l'ai mis sans faire exprès, le jeu de mot), je parle trop, avec mes doigts.

Allez, les gars, faites comme le "moi du début de l'après", regardez l'autre dans les yeux, et pas que!
Ces souvenirs me remontent le moral, dans ma solitude totale. Tout ça pour ça. C'est vraiment trop injuste!

Ne pas avoir peur des émotions, qui sortent de la boîte, incontrôlées. Pas habitué, ce n'est pas gagné.
C'est beau la vie, mais ça fait mal, sans anesthésie...


Ismael: GO!


#5
Hilde
Adhérent PsychoACTIF
09 juin 2019 à  09:59
Ismael77, Boots a raison, vas-y! J'ai beaucoup apprécié, s'il y a une suite, je prends...


Salut,

j'ai beaucoup apprécié l'écriture et le style de ce billet ; peut-être c'est à cause du contenu plus « intimiste » que les autres que tu as écrits, mais il y a une sonorité, une poésie urbaine désenchantée qui me fait écho...

j'ai aimé, malgré que j'aie toujours du mal avec le sujet « séduction », came ou pas came...j'ai du mal parce qu'il porte avec lui souvent des visions de genre que, en tant que « meuf », je vis comme bien renfermantes ; j' ai du mal, parce que, came ou pas came, j'ai pas confiance en moi (et au fond, je rejoins Boots, les prods me permettent d'aller vers les autres, débarrassée de la carapace d'éloignement que la vie m'a construit)...mais bon ça n’empêche pas d'aimer l'écriture et puis que de voir les choses à travers d'autres yeux ça fait toujours du bien

ismael77 a écrit

Le truc n’est surtout pas de serrer les dents, plus on force, plus on craque.

Et ça, j'approuve grave, beaucoup. Pas facile à expliquer, à pleins d'UDs aussi, mais je l'ai bien expérimenté !

ismael77 a écrit

C'est beau la vie, mais ça fait mal, sans anesthésie...

ça c'est carrément bien dit, des fois je trouve que c'est de la merde la vie, mais t'as fondamentalment raison, c'est juste que ça fait mal si on la ressent...

C'est vraiment bien ton blog, à mon avis, tu n'as pas à raccourcir tes textes, ni limiter tes envies d'aligner des mots, au contraire ! Fonce, et je sais jusqu'à quel point ça peut remuer, faire du bien, du mal, mais le résultat en vaut le coup...

À plus


Bizarre la vie...
Bizarres nos vies...

ismael77 a écrit

je me dis, «t’as vu leurs approches de merde, fais tout le contraire».
En me levant, je sais, que je n’ai pas de phrase toute faite ou d’autre approche et qu’il ne faut pas penser.

Bonsoir je m’appelle Ismaël et vous?

C’est tout, une minute après, j’en avais une sur chaque cuisse. Très chaudes les miss monde

C est tout...

Bizarre la vie.
Bizarres nos vies...
Allez un poème pour les lectrices lecteurs du blog d Ismaël.
"Le regard perdu à l horizon qui nous gagne
Le soleil à minuit
Du poivre plein nos vies
Et des lionnes pour qui nous accompagne"


#8
ismael77
Adhérent PsychoACTIF
09 juin 2019 à  20:07
en tant que « meuf »
Oui,
En écrivant j'y ai pensé.
Pour dire, je n'ai jamais connu, intimement de consommatrice. C'était mieux, cloisonné. Doubles vies.
L'alcool m'a aidé, à compenser l'arrêt de la meu, et surtout aidé à briser la glace, me désinhiber, j'étais alcoolisé, toujours, et puis en phase exaltée.
Mais les drogues me renferment toutes, du joint à la coke.

Quant aux femmes,
J'ai toute une théorie la dessus, le désir des femmes hétéro sexuelles, pour le mâle alpha, la compétition entre elles.
Ca fait comme si je parlais d'animaux, mais c'est une observation comportementale, c'est de la scénographie, parade. Dans ce goût là.

Je dirais que, quand une femme entre dans une pièce, parmi d'autres femmes, elle sait tout de suite la hiérarchie. Si.

Etre dans le lit de celui qui a les plus jolies, c'est en faire partie, de la liste. Ca m'a toujours frappé. Voir énervé. Avant d'en profiter.

Pourquoi mon amie, si intelligente et honnête, va-elle avec ce salopard, qui la trompe et profite d'elle? Elle dit, sincère, que c'est elle qui a la main!
En effet, elle le domine, intellectuellement...

A vrai dire les hommes aussi se classent, pas pour un joli minois, d'abord pour la bagarre, il te bat? J'te bats. Question quotidienne des CM.

Puis, c'est le pouvoir qui grise.
Pour moi celui de séduction, c'était tout! Ca marche, pauvre, jeune wannabe, après il faut du pèze. Mec rassurant. Ou aventurier amant secret, plutôt, sans famille. Fantasme de femme mariée.

Bon j'ai peu vécu ça, mais bien, j'ai beaucoup de choses à dire, y compris sur les coups de foudre.

J'ai commencé à écrire un (anti) guide du dragueur de fond, comme réponse au cynisme misogyne, amer, puéril, de Soral. Il y a eu des demandes pour la suite, les mecs trouvaient ça intéressant...Sur youtube.

C'est vraiment en direction des hommes hétéros, par contre. Le principe est d'éviter, qu'ils confondent, drague et mépris. Par l'exemple, et la philosophie.

A part ça, c'est le même sport.

Les femmes y participent.

Paris est la ville de l'amour, latine au nord de la France, on y drague comme à Rome ou Naples. Mieux, les femmes sont si belles. Une tradition que ne connaissent pas les anglo-saxons.

Le plus vieux sport du monde, non?

Ce n'était, en ce qui me concerne, pas une addiction, au contraire. Je n'en souffrais pas. Je ne perdais pas au change.

Toutes les anecdotes me reviennent...Je pourrais l'écrire de suite...le livre!
Allez, fermer l'ordi, dîner!

Merci


Anonyme813 a écrit

Je pourrais l'écrire de suite...le livre!

Go !


#10
Mascarpone
Vieux clacos corse pas coulant
10 juin 2019 à  08:03

ismael77 a écrit

on dit, chacun croyant avoir trouvé le «bon mot», que la came isole, de force. C’est vrai.

Oui,et...Non! Je n'ai JAMAIS été isolé et seul quand j'étais toxico. Déjà, j'ai toujours vécu en couple depuis mes 15 ans (je suis quelqu'un de trés fidèle en amour comme en amitié), depuis cet age, celui de mes 1ères relations sexuelles, je n'ai vécu que 7 mois seul (et c'était quand je ne touchais plus à rien).
Mais, il est vrai, qu'à compter du jour où certains on commencé à tâter de l'héro, la bande de potes a éclaté...Ceux (rares) qui n'ont pas voulu manger de ce pain là, se sont éloignés (et, c'est vrai, on les a complètement perdus de vue au bout d'un moment. Forcément, plus du tout les mêmes priorités et les mêmes centres d'interet, nous, c'est assez vite, même durant les 2 années où il n'y avait pas d'addiction physique, devenu l'héro le principal centre d'attention et le principal sujet de conversation snort ) Et puis, bien sûr, quand l'addiction est venue, comme chacun sait, entre trouver l'argent, trouver le plan, aller pécho et, tout le reste qui fait la vie lambda, on ne fréquente plus ou quasi, que des gens qui vivent de la même façon, pas de temps pour les autres ou si peu...

ismael77 a écrit

Des années de solitude totale, à ne fréquenter que les homies, plus les amis. Trop honte.
Vivre dans des squats, des caves, des piaules de quartiers minables, mais que j’aimais.

Jamais aucune honte ou culpabilité chez moi, quelle horreur! Et j'avais des amis parmi ceux que tu appelles les honnis (moi qui compte mes amis sur les doigts d'un manchot cool ), amis, qui, s'ils ne sont pas morts sad , sont toujours mes trés rares amis (il en reste 1 vrai de toujours).
Mais, s'il est vrai que j'ai connu une période de squat et de galère de logement, j'ai toujours travaillé et toujours mené une vie assez "normale" avec repas,couchés et boulot réguliers (ce qui aide sans doute à ne pas être totalement déconnécté du monde "normal" autour de soi).

ismael77 a écrit

L’ancien toxico est héroïque, le toxico en action, pathétique, diabolique. On avait peur de moi.

thinking Pas du tout vécu ça...Ceux qui l'ignoraient (tous ceux qui n'avaient pas à le savoir) me traitaient tout à fait normalement...Il faut dire aussi, que je n'étais pas du genre à piquer du zen dans tous les coins, j'ai toujours réussi à maintenir une tolérance "raisonnable", je n'ai jamais fait d'OD et sur moi, à part les pupilles (pour celui qui connait) et le poids un peu en dessous de ce qu'il aurait dû être, ça ne se voyait pas...

ismael77 a écrit

Ce n’est pas pour les conséquences qu’on s’abstient de se trouer la peau, mais parce qu’on a mieux à faire. C’est progressif, bien sur, et ne marche que si on a des centres d’intérêt. Ce qui est loin d’être le cas de tous les «résilients», c’est bien le problème.

Là, je suis d'accord! Perso, je n'ai JAMAIS vraiment eu le désir de décrocher...Mais, quand j'ai croisé un amour qui n'était pas du tout dans ce délire et que j'ai lu l'inquiétude et la tristesse dans ses yeux, j'ai décidé de mettre un frein, puis, de cesser ma conso (ça a mis 2 ans pour arréter totalement, mais ça a duré 15 ans sans que je retouche à la came), la personne ne m'avait rien demandé (elle voulait même, au début, que je l'initie, pour partager avec moi et déménager dans ma banlieue..Autant vous dire que ça m'a fait flipper! Du coup, c'est moi qui est migré dans sa banlieue (à l'opposé de chez moi)et qui me suis mis à stopper la came, c'est puissant l'amour lol )

ismael77 a écrit

J’avais ce visage, comme figé dans sa jeunesse, cristallisé, sans age, qu’ont souvent les camés à l’héro, quand ils stoppent à trente ans. Leurs traits sont, comme restés ceux du moment où ils ont commencé.
On est comme stupéfait. Et les rides d’expressions sont moindres, l’effet de l’opiacé donnant un masque, car on est dans un état «neutre», peu de sourires, congelé, comme la vie arrêtée.

Pour l'aspect plus jeune, carrément oui! Ou, à contrario, totalement non lol
Certains, qui ont vraiment eu la vie trop dure dans leur délire, ou qui ont vraiment carburé trop fort (souvent pas QUE avec un opiacé justement d'ailleurs) paraissent comme des jeunes "petits vieux"...Ce sont surtout les dents, absentes qui donnent cette apparence...Mais comme souvent, le look aussi est resté jeune...Mais, oui, c'est vrai, moi et la majorité des ex usagers d'héro que je connais, font au minimum, 10 ans de moins que leur âge. On a souvent rigolé avec ça en disant que la came, quand ça ne tue pas, ça conserve!lol

ismael77 a écrit

J’étais Narcisse, apprenant l’amour, de soi, dans le reflet des iris féminins, des pupilles dilatées par le désir.

Moi, malgré les regards à 99% trés positifs, je n'ai jamais vraiment réussi à me décomplexer dans ma jeunesse...Désormais,à mon âge avancé, je m'en fou...Mais, surtout, je me rend compte à quel point j'étais loin d'être si moche que ça...Ah si jeunesse savait et si vieillesse pouvait!pasdebol
Je dis ça, mais j'ai toujours été à 2 sans aucun mal et je suis plutôt heureux malgré tout.

Sinon, ton texte est bien écrit et bien sûr qu'on veut la suite wink

Mas


#11
ismael77
Adhérent PsychoACTIF
10 juin 2019 à  15:44

Anonyme813 a écrit

Mas

Tu dis tellement de choses vraies.
Ce qui nous sépare c'est effectivement la solitude, quand je consommais au quotidien. Et même quand j'étais en couple!

Mais, comme toi, en squat ou ailleurs, je bossais, beaucoup, pour payer la came. Et mes squats n'étaient pas des crack house!
M'enfin, un univers glauque, insécure, instable et dangereux, toxique quand même.

La came remplaçait ce lien affectif perdu, comblait solitude et sentiment d'abandon, de vide.
Une chaleur dans le corps et le coeur, pour les  soirées glacées d'hiver, les noëls en solitaire.

Un ersatz, dérivatif, cher, on (je) ne pense pas, à autre chose, qu'à la défonce.
Je n'étais plus seul, le képa rassurant dans la poche, mais avec moi même, et avec elle.
Qui, tant que je paye, est toujours là, fidèle.

Après, je n'ai jamais voulu, ou été attiré, par les gens, les femmes comme moi.
Une consommatrice d'héroïne dans un couple avec un autre tox, j'ai vu et pas aimé.
Ca ne s'est jamais fait une seule fois.

Je n'ai jamais gardé, malgré ma volonté de partager, une relation là-dedans.

Du coup rien, et quand j'ai eu été marié, j'avais une double vie. Là, il y avait de la culpabilité.
Qui ne faisait que renforcer le besoin de se défoncer.

La honte, oui c'est éviter les vrais amis, je me cachais dans mes piaules. Comme un dépressif.

Et un jour j'avais un vrai lit, à deux places, une femme sur une épaule (forte et fragile à la fois...) et le soleil à travers le vélux sur le visage, les oiseaux chantaient, et ce n'étaient pas des pigeons!

Qui aurait cru, parmi mes voisins, que je venais de loin, ce qu'ils voyaient, simplement, c'est que ça défilait...

Ca veut dire que toi, tu as toujours connu des filles qui te suivaient ou toléraient, partageaient ton kif?
Et que vous aviez aussi des amis dedans mais de moins en moins. Ca isole quand même.
Tout simplement parce que, quand tu es bien, tu n'as besoin de rien.
J'ai laissé une femme, en porte jarretelle, seule dans mon lit, une autre en plan dans Paris, en même temps, parce que la ligne sur la table (ou la pompe) me faisait plus envie.
Quel nul!

Un pote en prenait pour baiser. Mais après, sans, c'est pas bon..


En dehors de ce que tu racontes, j aime beaucoup ta plume, et on te lis facilement, c est fluide, efficace.
De plus on se retrouve forcément a travers tes anecdotes et j'ai hate de pouvoir en lire d autre.

Si je puis me permettre, voila un potentiel qui ne mérite que d etre exploité ..


#13
ismael77
Adhérent PsychoACTIF
11 juin 2019 à  08:22
Je voulais parler de livres (sur le sujet des drogues et comportements).

J'ai commencé un livre, que j'ai perdu, il s'appelle "the score", mais il y a deux cent livres avec ce titre (ils sont cons il faut l'ISBN ou quoi?).
C'est un guide de séduction (mauvais point) mais qui est à lire au 2ème degré aussi.
Le début, une clinique, un mec, négligé, une psy, sexy. Ils y vont pour un traitement de l'addiction sexuelle!

Le gars (ça m'énerve, sa façon de penser, tu le crois sympa, en fait c'est un gredin cynique, dès qu'il en a les moyens) se dit "si je veux je te mets direct dans mon lit ma jolie" En fait il est au bout du rouleau, prétend séduire (et plus) n'importe qui, n'importe quand (euh reste tranquille Johnny, c'est ma fille...).

Puis une scène, avec démonstration, le truc, mépriser, rabaisser, la fille aura envie de reconnaissance et fera waf waf, mouais...manipuler, calculer, bof.
Ca montre la misère, non affective comme moi,  mais intellectuelle, la futilité de LA. On te juge à tes fesses.
La fille taclée est censée s'accrocher à ta jambe? Il est jamais venu à Paris!
Ce livre, je le déteste et en même temps comme anti modèle...Et puis, c'est une histoire vraie, la preuve, ça commence par la fin, pathétique.

Autre livre, Beam me up Scotty.
Il y a pas de rubrique lecture, enfin j'ai cherché. Surtout pour ceux qui lisent l'anglais, qu'ils puissent commander.
Parce que, des livres, j'en ai à recommander.
Si vous arrivez (sans connaître) à comprendre le titre de ce "envoie moi au ciel Scotty" (ça va vous gêner pour comprendre, le titre en français!) livre de Guinsburg (1993), bravo!
Intraduisible ou presque, il y en qui ont essayé.
Je vous en reparlerai dans un billet ou forum dédié.


#14
Mascarpone
Vieux clacos corse pas coulant
13 juin 2019 à  21:16

Anonyme813 a écrit

Ca veut dire que toi, tu as toujours connu des filles qui te suivaient ou toléraient, partageaient ton kif?
Et que vous aviez aussi des amis dedans mais de moins en moins. Ca isole quand même.
Tout simplement parce que, quand tu es bien, tu n'as besoin de rien.
J'ai laissé une femme, en porte jarretelle, seule dans mon lit, une autre en plan dans Paris, en même temps, parce que la ligne sur la table (ou la pompe) me faisait plus envie.
Quel nul!

Quand j'étais dedans, tous mes potes étaient dedans et ma meuf aussi. Comme on avait tous la même mentalité, ça se passait plutôt bien, jamais d'embrouilles, plutôt de l'entraide.Au bout d'une quinzaine d'années, j'ai rencontré une meuf qui ne faisait que fumer du canna et picoler, je l'ai tout de suite joué cash en lui disant que j'étais accro à l'héro et ça n'a pas posé de problèmes...C'est moi, qui ai décidé de mettre un frein, puis, d'arréter (grâce à la codéine), car je sentais que ça la rendait malheureuse (elle était morte d'angoisse quand il m'arrivait de rentrer tard le soir parce que j'étais allé pécho...)et puis, maintenant, je suis avec quelqu'un qui a sensiblement le même passé que moi et qui a les mêmes idées sur la defonce que moi (à peu de choses près)donc, oui, tout baigne et tout a toujours baigné de ce côté là.

Pour ce qui est du sexe, la came ne m'a jamais rendu impuissant et n'a jamais annihilé ma libido (bien au contraire!), il n'y a guère que les saloperies que j'ai vu passer ces 5 dernières années pour m'avoir totalement coupé l'envie de niquer (et, il se trouve que ma meuf, comme mes potes et voisins ayant testé les mêmes cochonneries ont eu exactement le même ressenti..)mais, pour moi, ces merdes qu'on appelle came de nos jours n'ont plus rien avoir avec ce que nous avons connu, j'ignore comment ils les fabriquent ou ce qu'ils foutent dedans, mais le résultat, c'est que nous sommes totalement dégoutés du résultat obtenu à chaque tentative depuis environ 5 piges, du coup, fini les extras...

Amicalement

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