TR cérémonie bwiti

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frunobulax homme
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champi vert0champijaune0cxhampi rouge0
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Alors cette histoire complètement improbable  commence par une synchronicité assez dingue. Je n'avais pas du tout prémédité de tester l'iboga puisque c'est compliqué de s'en procurer, je ne pensais pas que l'occasion se présenterait sans devoir organiser un voyage au Gabon.

Attention, ça va être long parce que je ne me vois pas raconter le truc sans poser le cadre et décrire un peu le processus. C'est parti.

Chapitre 1: Le set & setting

Récemment j'ai emménagé dans une nouvelle coloc avec un super grand jardin avec un spot incroyable tout au fond avec des vestiges d'une église du moyen âge en ruines. Avant que je ne m'installe là bas, le gars qui gère la coloc me précise qu'il y a une "promo" sur le loyer en ce moment vu qu'il sous loue le fond du jardin le week end à un groupe qui organise des cérémonies. Intrigué, je fais des pronostics sur la nature des cérémonies en question et comme il m'a parlé de chants et de danses je pense rapidement aux cérémonies bwiti.

Vendredi dernier j'étais seul dans la maison à l'étage et j'entends du bruit en bas alors que mon coloc est en voyage. Du coup je descend voir et je tombe nez à nez avec un inconnu africain. Je comprend tout de suite que c'est un des gars qui font les cérémonies. Il est un peu surpris parce qu'il ne savait pas qu'il y avait un nouveau coloc, il s'attendait à ce qu'il n'y ait personne ce jour là. Du coup je me présente et rapidement je lui demande:
"-vous organisez des cérémonies avec l'iboga c'est ça?
-non."
Du coup je lui demande de m'en dire plus sur lui et ce qu'il fait et à son accent, ses expressions et ses allusions au "bois sacré" je comprendsque c'est bien de l'iboga qu'il s'agit, d'autant qu'il me précise qu'il est Gabonais. Je lui ai fait part de mon intérêt pour ces choses là, de mon parcours et de ma modeste expérience avec la mystique, ce qui a assez vite brisé la glace, et on a eu une discussion pendant 7 heures jusque tard dans la nuit.  Il m'explique qu'il est un nganga (c'est l'équivalent bwiti du chamane), qu'il a formé d'autres nganga au Gabon pendant 30 ans avant de venir en France, il me parle des différentes écoles du bwiti (lui pratique le Bwiti Missoko-ngondè). J'apprécie beaucoup le personnage, je constate qu'il connaît extrêmement bien le sujet et en même temps je ne me sens pas pris de haut du tout. Je vois qu'il me teste un peu de son côté aussi, mais le courant passe très bien. Je me méfie beaucoup des gens qui trempent dans les milieux mystiques, il y a beaucoup d'allumés et de bullshiteurs qui se contente d'alligner les concepts new age fumeux sans jamais rien dire de concret, mais là je sens bien que j'ai affaire à quelqu'un qui n'a rien à prouver et qui est sincère dans l'amour qu'il porte à ce qu'il fait. Avant d'aller nous coucher il me propose de venir assister à la cérémonie le lendemain.

Le samedi donc, les autres participants arrivent dans l'après midi. En plus du nganga il y a quatre de ses disciples, deux participants qui sont là pour recevoir un soin à la fin de la cérémonie, et moi même qui suis un peu là en touriste. Je ne m'attendais pas à prendre vraiment part à la cérémonie. On est en petit comité mais l'espace dans lequel a lieu la cérémonie est assez étroit, il s'agit d'une petite tour circulaire en pierres à côté des ruines de l'église, dans laquelle il y a une cheminée (parce que dehors la nuit ça tombait à -1°C quand même). Après avoir préparé plein de bouffe pour le soir même et le lendemain avant de passer à table vers 19h, puis l'un des disciples m'apporte un pagne (tout le monde était en pagne pendant la cérémonie).

Chapitre 2: La cérémonie

Il est un peu après 20h lorsque nous sommes assis en cercle dans la petite tour autour du nganga que je vois désormais dans sa tenue traditionnelle et maquillé de la tête aux pieds. A ses pieds il y a toutes sortes d'objets divers rangés dans des corbeilles ou disposés devant lui. Il m'invite à m'assoir juste à côté de lui (j'ai vraiment beaucoup apprécié son attitude vis à vis de moi, il semblait vraiment apprécier le fait de partager le bwiti, il n'était pas du tout dans le délire du mec qui veut garder tous ses secrets et il répondait à toutes mes questions) et il attaque tout de suite les hostilités en nous appelant tous un par un à venir devant lui pour recevoir une dose de racine d'iboga en poudre. Il y avait une cuillère à café par personne. A ce moment là je ne sais pas du tout ce que ça représente, je ne m'en occupe pas trop, je m'en remet entièrement au nganga pour gérer cet aspect.

Pendant les 4 heures qui ont suivi nous avons chanté sous la directrion du nganga qui faisait des sortes de sermons à la manière d'un prêtre mais à la sauce sagesse africaine. Les chants consistaient à un enchainement de strophes de complexité croissantes allignées par le nganga, auxquelles tout le groupe répondait une phrase chantée qui changeait régulièrement. Le tout sans pause pendant parfois plus d'une heure d'affilé, et en secouant ou en tapant sur des percussions et sur un tempo qui accélérait très progressivement. Le nganga était extrêmement attentif à l'intensité que chacun mettait dans l'exécution des chants et dans la précision rythmique et l'élocution. Il reprenait très sévèrement ses disciples qu'il jugeaient trop mous.
De mon côté, étant musicien je m'en sors bien avec les percus, mais pour chanter comme c'est une langue dans laquelle je n'ai aucune notion, je participe comme je peux, je fais plus ou moins les réponses en yaourt. C'est un moment très sérieux ou tout le monde est totalement absorbé par la situation et où tout va très vite.
Un peu après minuit le nganga nous arrête, puis il appelle ses disciples un par un et leur donne à chacun 3 ou 4 fois la première dose, puis il en prend encore plus pour lui avant de reposer le pot à ses pieds. Je suis un peu sur ma faim parce que je ne sens toujours pas monter la première dose, du coup je lui demande si je peux en avoir aussi. Il me file la même dose qu'à eux (c'est vraiment pas une partie de plaisir à manger, il faut pas mal de flotte pour que ça passe). Au moment de me lever pour aller recevoir le truc, je réalise que j'ai peut être fait une bêtise puisque je constate qu'une fois debout ça commence à tourner pas mal dans ma tête et que je galère pour marcher droit...
Après cela, les disciples partent se changer pour revêtir la tenue que requiert la phase suivante de la cérémonie, avec les danses et d'autres choses intrigantes. A leur retour nous reprenons les chants encore plus intensément que pendant la première partie.

Chapitre 3: L'iboga

il est 1h30 environ et je sens que ça monte fort. Je suis toujours dans la petite tour à côté du nganga à secouer des percussions comme un fou sur les chants qui vont de plus en plus vite. Le nganga finit par se jeter au milieu de la pièce complètement en transe en exécutant des danses surréalistes tout en déclamant une espèce de rap ultra rapide en dialecte. Le mec est impressionnant, en tant que musicien je suis assez sensible à ça et là c'est on ne peut plus évident que le mec est très très expérimenté pour avoir un tel niveau de maîtrise qui ne s'acquiert pas sans des années de pratique assidue. De mon côté je ressens l'ambiance comme de plus en plus vaporeuse et je commence à voir des choses briller transitoirement dans mon champs de vision, des petites trainées lumineuses dans l'obscurité, des petits points de lumière qui volent rapidement d'un mur à l'autre... C'est bien présent mais ça reste assez subtile. Mais j'ai la tête qui tourne de plus en plus et j'ai très chaud alors qu'il fait froid. Je commence à transpirer à grosses gouttes et je me sens de plus en plus mal quand soudain je ressens le besoin urgent d'aller vomir. Je me précipite dehors et je lache tout ce que je peux dans le gazon. Lorsque je redresse la tête, je constate que les visuels sont maintenant très intenses, très lumineux. Je vois des flammes bleues qui brulent la maison, dans le ciel la lune ressemble davantage à une mega boule à facettes, et globalement le jardin ressemble à la décoration d'un festival de psytrance. Mais les visuels sont d'une nature que je n'avais jamais rencontré avec aucune substance. Déjà sois ils sont très fugaces, soit ils sont presque immobiles. Il n'y a pas vraiment de formes géométriques et les couleurs sont toutes dans un registre bleu électrique ou vert. Je remarque aussi qu'elles disparaissent lorsque je ferme les yeux (alors qu'avec l'ayahuasca ou même la psilocybine a haute dose elles sont plus présentes les yeux fermés d'après ma propre expérience). Les visuels se déploient comme par extension du monde extérieur.
J'entends une espèce de buzz de plus en plus intense et je sens la terre trembler. Je galère pour me déplacer autrement qu'en rampant, je suis en pagne par -1°C dans le jardin et je me sens minable. Les visuels ne m'impressionnent pas trop, ils n'ont en eux mêmes pas grand intérêt, par contre le body load est épouvantable. Je vais dans le salon de la maison me poser un peu avant de retourner à la cérémonie. Mais chaque fois que j'essaye de me lever, ça se met à tanguer très fort et j'ai beaucoup de mal à marcher. Du coup je monte m'allonger sur mon lit le temps d'être en état de me lever.
Une fois allonger le body load se calme. Je suis dans le noir et je sens que ça a cessé de monter. Visuellement il ne se passe rien d'intéressant, mais le meilleur était à venir. Je me suis laisser porter par l'effet mental de l'iboga qui pour moi est clairement l'intérêt de cette plante. Mes pensées étaient d'une clarté époustouflantes. Je recevais toutes sortes d'éclaircissement très précis et très significatifs sur des aspects particuliers de ma vie, de ma relation au monde, aux autres et à moi même. C'est très difficile à décrire comme aspect, car ce n'est pas spectaculaire. Pourtant c'est d'une puissance phénoménale et c'est ici que réside le pouvoir de l'iboga en ce qui concerne la lutte contre les addictions. L'iboga ne guérit pas les addictions, mais elle donne des clés extrêmement utiles à l'esprit pour s'armer contre les comportement addictogènes mais aussi tous les comportements qui nous minent au quotidien et qui nous font stagner. Je suis resté allongé là jusqu'à 7h avant de retourner rejoindre les autres. J'avais raté la partie la plus mystique de la cérémonie malheureusement et je m'attendais un peu à ce qu'on me juge pour avoir eu les yeux plus grands que le ventre, comme si le nganga avait voulu me donner une leçon en me filant une dose pareille alors que c'était ma première fois. Mais au lieu de ça ils m'ont super bien accueilli, ils m'ont même félicité en me disant que c'était super que j'ai vomi et passé la nuit tout seul dans mon coin, parce que ça voulait dire que j'avais besoin d'être purgé et que tout s'était passé comme cela devait se passer.

La cérémonie a pris fin a 8h30, soit 12 heures après avoir commencé. Puis tout le monde est allé faire une sieste. Moi je suis retourné m'allonger parce que je continuais de vomir dès que je buvais de l'eau et que ma tête tournait trop.
Vers 18h le dimanche, le nganga a nouveau dans sa tenue de civil est monter me voir avant que tout le monde rentre chez soi, et on a eu une discussion extrêmement intéressante au cours de laquelle il m'a révélé le pourquoi de toute la cérémonie.
En fait, tous les chants (qu'un initié doit apprendre par coeur et il y en a des centaines), tous les rituels très précis, toutes les règles strictes et la discipline de fer, tout cela n'a qu'un seul but: entraîner l'esprit à la rigueur nécessaire pour effectuer le véritable travail mystique qui a lieu au climax de l'expérience. Il m'a dit que dans le monde mystique, on ne pouvait pas tricher ou improviser sans courir un risque important et que pour y réaliser efficacement les travaux nécessaires à une réelle transformation de l'individu (ce qui est le but final du bwiti; rendre l'homme meilleur dans ses relations aux autres et à lui même), il fallait incarner des valeurs de droiture, de fiabilité, d'humilité et de responsabilité très fortes. Il ne m'a pas parlé de faire plaisir aux esprits de la forêt, ni invoqué le surnaturel, il m'a clairement expliqué le pourquoi du comment du bwiti et j'ai tout de suite compris où il voulait en venir, surtout après avoir moi même fait 'expérience de l'iboga.

Je n'ai dormi pour la première fois après que le lundi matin pendant quelques heures au cours desquelles j'ai eu le moment le plus intense, sublime et bouleversant de toute l'expérience, de très loin. C'était sous la forme d'un rêve extrêmement vif, riche, dense, intense, vivant, drôle et poétique, qui ressemblait à un film d'animation réalisé par un génie absolu. Je me rappelle très bien du rêve mais le raconter prendrait des heures. Je n'ai jamais eu un rêve de cette nature dans toute ma vie. A mon réveil je me le suis remémoré une fois et d'un coup j'ai senti un flot d'émotions m'envahir et j'ai littéralement fondu en larmes. Je n'étais pas triste, c'était des larmes d'émerveillement pur, autant vis à vis du rêve lui même que de la possibilité qu'un tel rêve puisse se matérialiser dans un esprit. J'ai lâché toutes les larmes de mon corps, je n'ai jamais pleuré comme ça avant...

Là on est mardi soir et je ressens encore l'after glow, je vois toujours des trainées lumineuses derrière les objets en mouvement, c'est très long à redescendre totalement mais on m'avait prévenu. J'ai beaucoup de mal à dormir par contre tant que tout n'est pas totalement redescendu et les rêves que j'ai fait la nuit dernière étaient significativement plus intenses que d'habitude mais sans commune mesure avec celui d'hier matin. En revanche au niveau du mental je ressens encore très nettement quelque chose d'anormal. Mes pensées sont très claires, mais ce n'est pas très confortable parce que j'ai l'impression que beaucoup de paradigmes et de patterns comportementaux que j'avais sans forcément m'en rendre compte ont été très esquintés. Autre chose anormale, à plusieurs reprises après le rêve incroyable là, j'ai été submergé par des émotions intenses qui me tiraient les larmes. Ca ne venait pas comme ça, mais en écoutant de la musique ou en regardant un film hier. Chaque fois que j'étais en présence de quelque chose que je trouvais très beau. J'ai l'impression de vivre un reboot progressif sur plusieurs jours après l'expérience. Sur le moment je ne me serais pas du tout attendu à ça, je pense que je vais avoir besoin de beaucoup de temps pour tout digérer dans ma tête.

Chapitre 4: Conclusion

Si c'était à refaire je le referais sans hésiter. Par contre je ne le ferais pas en dehors d'un cadre cérémoniel. Le nganga m'avait prévenu que dans le bwiti, l'iboga n'est qu'un aspect (central néanmoins) de la totalité de la chose et après coup c'est vrai que ça a totalement du sens. D'autant que la mystique m'intéresse autant que je m'en méfie du fait du très haut risque de bullshiteries diverses qu'attirent les pratiques qui s'en revendiquent. Pour l'ayahuasca je suis plus sceptique sur l'intérêt de la cérémonie. Attention, je ne dis pas qu'il faille le faire seul, je pense au contraire qu'il faut toujours le faire accompagné par une personne expérimentée comme avec n'importe quel psychédélique. Ce que je veux dire c'est que les cérémonies ayahuasca actuelles dans leur très grande majorité n'ont rien de traditionnel, c'est un folklore qui va attirer les touristes qui seront rassuré par l'aspect cérémoniel, ce qui ne peut être que positif pour le set & setting. Mais le rôle de l'accompagnateur dans une session ayahuasca, c'est surtout de veiller à la sécurité du ou des participants et que le mec soit chaman ou non, du moment qu'il a de l'expérience, ça ne change pas grand chose. Il y a 50 ans, les cérémonies ayahuasca telles qu'on les connait aujourd'hui n'existaient pas et les peuples autochtones l'utilisaient autrement (et différemment selon les régions et les groupes ethniques). Il n'y a donc pas une "bonne" manière  d'utiliser l'ayahuasca avec un protocol rituel précis et établi.
Pour le bwiti c'est très différent. C'est presque une société secrète dont la pratique initiatique se transmet de nganga à disciples depuis des siècles, voir bien au delà, avec le souci absolu de respecter des règles strictes et de les préserver à travers le temps. Il existe plusieurs écoles (pas énormément) mais le tronc commun à toutes est resté assez peu changé par rapport aux origines. C'est une pratique mystique spécifique à l'iboga et à la toute petite région d'Afrique où elle pousse, qui a été mise au point sur des siècles de transmission orale avec un but bien précis. Du prendre l'iboga comme un trip ordinaire avec juste un trip sitter expérimenté mais sans le cadre rituel, ça me semble assez vide de sens, d'autant que les effets mentaux à la fois subtiles et très profond font qu'il est très utile d'être en contact avec un nganga qui maîtrise tous les aspects de cette tradition.
Enfin, j'ai particulièrement aimé l'ambiance de cette cérémonie, tout le monde avait l'air heureux, c'était à la fois très sérieux, mais en même temps très bienveillant, c'est très agréable de vivre une telle expérience dans un cadre aussi rassurant.  Tout le monde était attentif aux autres et au groupe. J'ai des chants bwitis qui tournent en boucle dans ma tête depuis. J'ai raté le moment le plus important de la cérémonie vu que je n'arrivais pas à tenir debout, mais ils refont une autre cérémonie bientôt donc je sens que je vais avoir l'occasion d'approfondir le truc.

Je sens que j'ai trouvé la meilleure coloc possible n'empêche!

Dernière modification par frunobulax (07 décembre 2022 à  03:16)

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frunobulax homme
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champi vert0champijaune0cxhampi rouge0
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Petite mise à jour une semaine après.

L'expérience n'était pas terminée lorsque j'ai rédigé mon trip report. Elle s'est poursuivie toute la semaine et n'est d'ailleurs toujours pas terminée. Il me semble important d'adresser une mise en garde sur le pouvoir de cette plante, que je n'avais pas bien mesuré immédiatement après. Il s'est passé quelque chose de très important dans ma psyché qui fait que plus rien ne sera comme avant. J'ai bien cru que j'avais totalement perdu la raison à un moment la semaine dernière. Trop de choses extrêmement perturbantes pour mon esprit rationnel se sont bousculées d'un coup dans ma tête mardi dernier et ont abouti à une cascade de prises de consciences vertigineuses sur énormément de choses. J'ai été pétrifié de terreur pendant plusieurs jours avant de me rendre à l'évidence du fait que j'étais soit clairement en train de perdre la boule, soit confronté à un éveil spirituel extrêmement brutal et l'une ou l'autre de ces possibilité me terrifiait car elles impliquaient que la personne que j'avais été jusque là n'existait plus, voir n'avait jamais réellement existé.

J'ai finalement  réussi, je crois, à stabiliser mon esprit et à surmonter l'angoisse, notamment à l'aide de la fascination et de l'émerveillement que suscitait cette expérience en moi. Je pense avoir les moyens, et même la responsabilité, de sortir grandi de cette expérience et que son issue positive ou négative dépendait entièrement de moi. Mais il est clair que l'iboga détient un pouvoir très singulier et mystérieux que l'on ne retrouve dans aucune autre plante. Même l'ayahuasca n'a pas un pouvoir comparable, son action sur la psyché n'est pas aussi intime et implacable.

Chaque fois que j'ai dormi depuis la cérémonie, j'ai fait des rêves extrêmement troublants par leur nature et leur intensité, même si dans l'ensemble ils vont decrescendo et tendent vers un retour à la normale. Tous les matins lorsque je me réveille, j'ai des résurgences de l'effet de l'iboga avec un bourdonnement dans ma tête, une sensibilité extrême a la lumière, des trainées lumineuses derrière les objets en mouvement et un odorat très anormalement affuté. Ca dure 30 minutes avant de s'estomper, mais dès que je me retrouve dans l'obscurité pendant quelques instants ça se réactive. Ce n'est pas vraiment gênant, ni désagréable, mais c'est très curieux.

Par ailleurs j'ai essayé de tirer une latte sur un joint de mon coloc jeudi soir et ça m'a tout de suite fait partir en crise d'angoisse totale. J'ai réalisé que je n'aurais plus jamais envie de consommer du THC, que c'était épouvantable comme truc, alors que j'adore la cannabis, j'en ai consommé pendant 15 ans sans jamais avoir de problème. Idem lorsque j'ai pris un paracetamol codéiné l'autre soir pour mon mal de dos, j'ai détesté l'effet très inconfortable que j'ai ressenti alors que j'en prend assez régulièrement depuis des années et que je l'ai toujours très bien toléré. Du coup je comprends mieux maintenant pourquoi l'iboga est réputée pour son pouvoir dans la lutte contre les addictions. Clairement je n'ai plus du tout envie de consommer autre chose que de l'eau et une nourriture saine et de faire du sport.

Enfin, autre conséquence très curieuse de cette expérience, ma sensibilité au beau est exacerbée à l'extrême.  Je ressens des émotions telles en écoutant de la musique, en lisant des livres ou en matant des films, que parfois je fond en larmes d'un seul coup. Je ne pleure pas de tristesse ni de joie mais d'émerveillement. Ma propre créativité est également très nettement stimulée, je m'en rend compte quand je travaille le piano, je prend beaucoup plus de plaisir que d'habitude et tout me semble facile.

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psilum homme
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champi vert0champijaune0cxhampi rouge0
Inscrit le 22 Aug 2017
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Merci pour ce retour.

Ca résonne beaucoup avec mon expérience de l'iboga, voire même totalement.
Effectivement ce n'est pas comme les autres plantes ou on a le choix à un retour à la normale (plus ou moins), ça te change en profondeur et à jamais. Quelque chose s'ouvre et ne se referme jamais vraiment.

Pour moi, mon rapport au monde a totalement changé et il a fallu faire avec ce qui n'a pas été facile.
C'est assez brutal de se retrouver tout nu sur une planète si contrastée par sa beauté, son vivant, sa folie, sa société en perte de sens...
L'iboga m'a obligé à changer mes habitudes, ma manière de penser et d'interagir avec l'extérieur.
Bien sûr ça redescend avec le temps et on apprend à faire avec, cependant quelque chose reste.

Depuis j'ai un sens beaucoup plus clair de ce qui est bon ou mauvais pour moi et mon corps me le fait bien comprendre. Pour moi aussi plus de cannabis (angoisse assurée) ou alors une toute petite pincée, les psychédéliques (de type 5HT2A) à petites doses uniquement, et les drogues stimulantes (cocaine, amphétamines) sont à éviter. Les excès de nourriture passent mal et j'ai parfois de drôles de sensations dans le corps.

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Moïse et son bateau vert homme
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champi vert0champijaune0cxhampi rouge0
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Salut, super témoignage !
Comment les choses évoluent ?

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