Plan national contre les stupéfiants : non au tout répressif

/forum/uploads/images/1571/1261219-000_13264djpg.jpgDes agents de la BRI sécurisent un accès au quartier de l'Ozanam, à Carcassonne, lors d'une perquisition chez un présumé dealer. Photo Eric Cabanis. AFP

La nouvelle stratégie du gouvernement contre les drogues ne fait que poursuivre la même politique axée sur la prohibition et la répression, menée sans succès depuis des décennies. Un large débat national est nécessaire afin de remettre au centre des réformes la santé publique et la cohésion sociale.

Tribune. Le gouvernement a présenté mi-septembre son nouveau plan national de lutte contre les stupéfiants. Cette présentation a symboliquement eu lieu à Marseille en présence de quatre ministres (Intérieur, Justice, Budget, ainsi que le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur). Nous prenons note, comme nombre de citoyens français, de l’absence des ministres de la Solidarité et de la Santé, de l’Education nationale et de la Jeunesse, de la Politique de la ville et de la Lutte contre la discrimination. Cela confirme, s’il le fallait, l’idéologie répressive qui préside à une nouvelle «guerre aux drogues» française, condamnée à échouer comme les précédentes.

Malgré plus de cinquante ans de répression policière et judiciaire contre les habitants des quartiers défavorisés et les moins pourvus en infrastructures sociales et économiques, les échecs se sont accumulés : le marché criminel de la drogue s’élève à 3,2 milliards d’euros par an ; 80% des règlements de comptes répertoriés sont liés à la drogue ; les prisons sont surpeuplées, avec des conditions de détention indignes ; des milliers de décès chaque année sont directement attribuables à l’usage de substances du marché de rue toujours plus dangereuses, coupées avec des additifs néfastes et dont les dosages sont toujours plus puissants.

Et que propose le nouveau plan national ? Sa pièce maîtresse est la création d’une «DEA» (Drug Enforcement Agency) à la française, alors que l’on sait que son inspiratrice américaine n’a pu réduire ni la production, ni le trafic de substances illégales, ni leur dangerosité. La violence dans les quartiers – entre les organisations criminelles et de la part des forces de l’ordre – est au plus haut et les réponses aux problèmes de santé publique, qui n’épargnent aujourd’hui aucun Etat et aucune grande ville du pays, ni aucune strate sociale, tardent trop pour endiguer la crise sanitaire.

Traque de la corruption

Certes, il importe de développer la lutte coordonnée contre les organisations criminelles transnationales. Ceci suppose une collaboration intergouvernementale en ce qui concerne l’échange d’informations, la traque de la corruption et du blanchiment d’argent, et la mise en place d’un contrôle efficace du cyberespace. Car ce sont bien les «barons» du crime organisé et leur enrichissement qui doivent être la cible de la répression internationale.

Or le plan ne différencie pas les divers niveaux de responsabilité dans le marché illégal de la drogue et se concentre sur les acteurs non-violents et «prolétaires» de ce marché –consommateurs, petits trafiquants et passeurs. Espérer remonter la filière du trafic en criminalisant les délinquants du bas de la pyramide criminelle, si facilement et rapidement remplaçables, est non seulement inefficace mais encore contre productif : le marché se nourrit plus des conditions socioéconomiques des couches sociales les plus dépourvues que de l’avidité des pauvres. De plus, l’idée que les autorités soient capables d’anticiper les évolutions du marché des drogues se trouve discréditée par l’arrivée chaque semaine sur le marché de nouvelles substances psychoactives – plus puissantes, plus faciles à produire et à transporter – ainsi que par l’impossibilité de collecter des données fiables sur leur consommation et leur dangerosité, dès lors que la confiance entre les populations visées et l’Etat est rompue.

L’introduction de l’amende forfaitaire délictuelle de 200 euros pour usage de drogues traduit cette volonté répressive envers les jeunes des zones urbaines sensibles. Dans les beaux quartiers, où la consommation de substances illégales se fait derrière des portes fermées, l’amende ne sera pas douloureuse. La réforme du code pénal conduira par contre les plus défavorisés devant le juge. L’arbitraire ne fera qu’exacerber les problèmes existants. Ce cercle vicieux doit être brisé.

Mesures sociales

La prévalence de l’usage de drogues est plus élevée en France que dans les pays européens qui ont assoupli ou abandonné les stratégies répressives. La réponse «aux dangers, aux drames humains et à l’insécurité» évoqués dans le nouveau plan national – dont nombre sont causés ou exacerbés par des politiques basées en priorité sur la répression – se trouve dans une approche centrée sur les individus. Les pays qui ont mis en place une politique axée sur la dépénalisation de l’usage et de la possession de drogues, de fait ou de droit (tels que les Pays-Bas, la Suisse, le Luxembourg, le Portugal et la République Tchèque) maîtrisent mieux que la France les problèmes liés aux drogues. Par ailleurs, la mise en œuvre de services de réduction des dommages accessibles à l’ensemble de la population à risque, notamment des salles de consommation supervisées et des analyses de substances illégales, ainsi qu’un large spectre de traitements offerts aux personnes dépendantes et l’accent mis sur des mesures sociales, ont permis une réduction de la stigmatisation et de la discrimination des consommateurs de substances psychoactives illégales, facilitant l’intégration sociale de celles et de ceux qui en font un usage problématique. La sécurité et la qualité de vie des habitants des quartiers touchés par le deal de rue s’en sont trouvées améliorées.

Le terme de «guerre aux drogues» avait été utilisé pour la première fois en 1971 par le président Nixon. La «guerre aux drogues» a précipité les villes nord-américaines, l’Amérique latine et les Caraïbes dans une spirale de violence, de meurtres, de corruption, d’affaiblissement de la puissance publique et de «narco-Etats», et de violations majeures des droits humains. Avec son plan national de lutte contre les stupéfiants, la France renouvelle sa propre déclaration de guerre et se condamne à répéter encore et toujours une politique qui a échoué. Nous appelons de nos vœux un large débat national qui permette d’analyser les causes de cet échec et ouvre la voie à des réformes fondamentales des politiques en matière de drogues : priorité à la santé publique, à la cohésion sociale, à la fin du tout répressif. Ce débat ne devra pas faire l’impasse sur les conséquences d’un demi-siècle de prohibition et examiner comment l’Etat peut prendre le contrôle de marchés aujourd’hui abandonnés aux mains d’organisations criminelles.

La Commission globale de politique en matière de drogues est une organisation indépendante constituée de 27 membres, dont 14 anciens chefs d’Etat ou de gouvernement et quatre lauréats du prix Nobel. Elle s’est donné pour mission de promouvoir des réformes des politiques en matière de drogues sur la base de faits scientifiquement avérés, qui s’inscrivent dans le cadre des politiques de santé publique, d’intégration sociale et de sécurité, dans le strict respect des droits humains.

SOURCE : liberation.fr

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#2 
Vivel homme
Adhérent PsychoACTIF France
19 octobre 2019 à  10:58
Merci pour le partage :)

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#3 
Rick
Adhérent Psychoactif
20 octobre 2019 à  17:43
Comment faire avancer le débat? qu'est ce qui va faire le déclic politique que l'on attend depuis des années?

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La bourse Rick, c'est ce qui fait avancer les traitements de substitution ou l'utilisation des cannabinoïdes en médecine par exemple.
Malheureusement les contingences politico économiques passent avant la raison.
Ce sont les même montagnes de pognon qui soit en bourse directement soit reinjectees dans la finance et la politique donnent à Culiacan des airs de Syrie quand les petits poulets risquent de passer à la casserole.
Sinaloa tristesa.

Dernière modification par Mister No (20 octobre 2019 à  20:57)


Just say no prohibition !

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Merci Filou pour le partage ,

En voyant la photo de Carcassonne où j'ai vécu 14ans ( juste après mon service militaire ) Déjà à l'époque La cité de " la Conte " près de la Cité Médiévale ( la Conte-Ozanam de nos jours ) avec des lotissements pavillons non loin des HLM tous réhabilités.. en 2017 si je ne dit pas de bêtises , était déjà le quartier le plus chaud de la ville , où le deal était bien implanté , avant le Viguier ou j'ai habiter 1an , mais pour après prendre 1 petit appart. dans le Centre ville...

Bref...sinon je me pose la même question que Rick.
Et oui comme tu dis Mister No , c'est un problème politico-économique, mais ça demande réflexion s'il y aurait d'autres leviers d'action , pour essayer de faire bouger les choses.

Surtout que les temps changent, et il y a des années je n'aurais jamais cru qu'un collectif comme PCP verrais le jour.

amicalement

MM

Dernière modification par Meumeuh (20 octobre 2019 à  23:25)

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#6 
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PSYCHOCRACK
clean comme withney houston France
21 octobre 2019 à  19:09
"la traque contre la coruption", de façon international!

c'est du lourd leurs programe!!!

j'en rigole déjà!

encore des promèsse non tenue!

j'ai pas tout lue je vais lire le reste pour me fendre de rire, ou pleuré.....

y'a pas l'éradication du pavot et de la coca de la surface de la terre???

"il n'y à qu'une seul voie qui mêne au poumons, alors faut bien la goudronné" ^^

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#7 
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Stelli femme
Modératrice - Dinosaure de PA France
21 octobre 2019 à  21:51
Dans la même veine... en ce moment sur LCP : DÉBATDOC, Cocaïne, la drogue de tous les dangers. (Fait suite à un reportage « Trafics. Les routes de la cocaïne. »)
http://www.lcp.fr/emissions/294940-deba … o19-ss-doc
Je me marre (jaune...), le nombre d’inepties à la minute, ils battent des records, grosse propagande répressioniste...
La présidente de la MILDECA fait partie des invités donc bon pas de surprise...

Dernière modification par Stelli (21 octobre 2019 à  21:59)

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Hello Stelli et les autres,

Le débat vient de finir.
La conclusion du propos (par Madame la Présidente...)  est à elle seule un monument, je cite :

" Les consommateurs sont des imbéciles".

No comment.

Blast.

Dernière modification par blastfunk (21 octobre 2019 à  23:55)


Ma vie m'appartient.

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Ca va être dur d'avancer sur la régulation avec ce genre de déclaration, pourtant Macron se dit pour la légalisation mais les faits ne suivent pas comme d'hab..

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#10 
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Stelli femme
Modératrice - Dinosaure de PA France
22 octobre 2019 à  00:06
Il y a eu aussi les affirmations comme quoi le cannabis c’est la première étape vers les drogues dures et la cocaïne, avec une incitation des dealers qui feraient des prix de gros à ceux qui achèteraient les deux au lieu du cannabis seul... WHAT? On m’avait caché ça??

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C'est assez vrai, disons que les mécanismes et leviers d'importation ont réuni de manière visible les flux de coke liés à ceux du cannabis, de leur filière d'importation à la revente, avec des puces au bout du bout comme fichier client.
Les hollandais ont créé les coffee shop pour éviter que les consommateurs de cannabis soient sollicités par des VRP multiproduits.
A différencier avec une partie des chercheurs français qui vont tenter de prouver par tous les moyens que le cannabis est la porte d'entrée à d'autres drogues qui seront consommées dans une théorie de l'escalade. Les résultats orientés de ces équipes de chercheurs seront alors instrumentalisées.
Dans les années 80, quand vous avouiez consommer du cannabis, de très nombreux médecins vous regardaient comme des futurs héroïnomanes, persuadés que vous serez grignotés par une forme de cancer.
Certains membres des académies de politique médical ou pharma instrumentalisent encore grossièrement les statistiques pour prouver que l'usage du cannabis est un cancer social qui va se métastaser en la plus dure des polytoxicomanies.

Comment faire avancer le débat? qu'est ce qui va faire le déclic politique que l'on attend depuis des années?

Je, toi, nous, déjà à travers ce forum. super
Même si nous n'avons pas un énorme écart d'age, ce forum est aussi le reflet d'une présence qui ne s'exprimait pas.

Dernière modification par Mister No (22 octobre 2019 à  08:58)


Just say no prohibition !

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#12 
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Cycle homme
Nouveau Psycho France
22 octobre 2019 à  15:41
Les drogues légales sont les plus inutiles les plus dangereuses, les plus vicieuses... Elle ne permettent aucun enrichissement personnel et sont très addictives.
Certaines drogues illégales sont déja plus intéressante : les psychadéliques par exemple :  bcp de personnes en parle comme une éxperience de renaissance et sans accroche. Bref ce sont les moins dangereuses à mon avis.
Si tous le monde avait déja consommer du lsd le monde n'en serai que meilleur je pense. Mais bon vue que cela nuirait à notre société de consommation de masse....
Plutôt que de faire de la propagande sur les drogues y ferait mieux d'éxpliquer tous leurs aspects du plus interessant aux plus dangereux et permettre la consommation en tout liberté et sécurité ( des trucs de qualité quoi avec de la RDR)
FAUT LÉGALISER  TOUTE LES DROGUES BORDEL

Dernière modification par Cycle (22 octobre 2019 à  15:42)


"T'as vraiment de la veine toi tu sais, t'as pas dû attendre toute ta vie pour vivre un truc extraordinaire". Walter White

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#13 
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Cazale homme
Ex-Opiomane/Benzohead France
22 octobre 2019 à  17:24
La traque contre la corruption de façon internationale ?
La bonne blague !
Qu'ils s'occupent déjà de la corruption dans le milieu financier et politique...
Les consommateurs de drogues des imbéciles ?
On verra ce que Madame dira quand ses enfants et/ou petits-enfants en consommeront (si ce n'est déjà fait)

Que le trip soit long ou court m'importe peu...tant qu'il est intense.

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