La musique comme une drogue sur le cerveau

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Gilda
Banni
Inscrit le 16 Apr 2017
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Je pense être à peu près dans la bonne rubrique. La musique accompagne souvent nos trips, quels que soient les produits, et nos playlists ne sont pas les mêmes selon nos trips, comme si d’instinct on savait ce qui va coller à quoi.

L’article contient quelques approximations du fait du journaliste, mais les propos du neurologue qui y sont rapportés sont intéressants.
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À lire en musique tongue



La conscience au pays des musiques électroniques


De nombreux battements par minute, des lignes de basses puissantes... Née à la fin des années 1980, la techno transporte ceux qui l'écoutent dans un cocktail sonore intense et hypnotique, procurant des sentiments de puissance, de relaxation ou d'empathie. Comment les musiques électroniques agissent-elles sur notre cerveau et notre conscience ? Techno, house, deep-house, électro : à chaque intensité ses effets.

Des basses puissantes et répétitives, des sons entrant en résonance avec le corps. Les musiques électroniques transportent leurs aficionados dans un autre monde, leur donnant joie et énergie.
Quand Nicolas, 21 ans, écoute de la psytrance, style de musique électronique psychédélique, il affirme ressentir « un bien-être, du bonheur, et afficher un sourire ineffaçable sur le visage ». Sarah, 23 ans, « voyage du côté de l’inconscient », lorsque la techno atteint ses oreilles. « Cette musique agit comme un antistress et provoque un bonheur immense en moi ».

Ces réactions physiques et psychiques ne sont pas le fruit de leur imagination. « Ces effets psycho-moteurs ne sont pas surprenants, explique le Dr Pierre Lemarquis, neurologue à Toulon et auteur du best-seller Sérénade pour un cerveau musicien (éditions Odile Jacob, 2009). Les musiques électroniques répétitives provoquent la transe, avec des effets sur la motricité. Même si nous ne bougeons pas, notre cerveau chante et danse ».

Comment la techno peut-elle procurer un bonheur intense à certaines personnes, et donner la nausée à d’autres ? Le tempo serait-il trop rapide pour ces derniers ? « Les oscillations d’un cerveau au repos tournent autour de 9 hertz, soit neuf à dix oscillations par seconde. » Un rythme soutenu. Il n’y a donc pas de raison qu’une musique rapide agresse le cerveau.
Il n’a pas fallu attendre la modernité pour que certaines musiques soient jugées trop intenses. Mozart lui-même en avait fait les frais, l’Empereur d’Autriche Joseph II lui faisant remarquer que la musique de son opéra L’enlèvement au sérail comptait trop de notes.

Pour le Dr Lemarquis, la perception de la musique, comme l’alimentation, est affaire de culture : « La différence se situe entre l’émotion et le jugement. Si une personne est dans le jugement, considérant que la musique n’est pas de sa culture, et ne se situe pas dans l’émotion, elle aura mal à la tête. Au contraire, si la personne s’identifie à la musique, l’émotion prendra l’avantage sur le jugement et procurera du plaisir » .

Pourquoi la musique, sous toutes ses formes, a-t-elle un impact aussi important sur notre corps et notre esprit ? « Il y a plus de cellules nerveuses pour l'ouïe que pour tous les autres sens réunis », révèle le neurologue. Une fois captée par nos oreilles, la musique atteint notre lobe temporal, la partie du cerveau dédiée à la détection des sons et du langage.
La mélodie parvient ensuite dans le lobe frontal. « Chez l’humain, cette zone est beaucoup plus développée que chez les animaux, explique le Dr Lemarquis. Elle nous permet d’agir sur le monde, de prendre la décision appropriée pour assurer notre survie. »

« La dopamine nous donne envie de vivre, de bouger »

Le circuit cérébral ne s'arrête pas là : les sons passent dans le cortex insulaire, la partie la plus évoluée et la plus profonde du cerveau. Cette zone, dédiée aux émotions, est reliée au circuit du plaisir et de la récompense. Le Dr Lemarquis se veut plus précis : « L’aire tegmantale ventrale et le nucleus accumbens sécrètent plusieurs substances. D’abord, la dopamine, neuromédiateur du désir, qui nous donne envie de vivre, de bouger. D’autre part, l’adrénaline. S’il y a peu d’instruments, un air doux avec un tempo lent, la musique diminue l’adrénaline et permet la relaxation. Au contraire, s’il y a du volume, beaucoup d’instruments et un tempo rapide, la sécrétion d’adrénaline va augmenter. » C'est la raison pour laquelle Auguste, artiste plasticien sonore, écoute différents types de sons, selon son état d'esprit : « J'écoute de l'électro-chill ou de la deep-house pour leur côté mélodieux ou ensoleillé. La techno est plus intense dans l'énergie qu'elle délivre. J'en écoute souvent pour travailler », révèle ce fan de musiques électroniques de 34 ans.

Si la techno se caractérise par un nombre élevé de battements par minute, elle comporte aussi des basses importantes, qui peuvent développer en nous un sentiment de puissance, une impression de maîtriser la chance, le destin. « Dans la vie courante, ces sensations peuvent nous donner du tonus, de l'énergie, et nous amener à progresser », assure le Dr Pierre Lemarquis.

Techno et conception de la totalité

Ceci explique que des morceaux comme We are the champions ou We will rock you, de Queens, soient souvent diffusés dans les tournois sportifs. « Ces musiques sont composées en mode majeur, avec des basses importantes, beaucoup d’instruments et un volume élevé ».
Les musiques en mode majeur, qui incluent aussi bien la techno que les compositions romantiques de Wagner, donnent envie de considérer les choses dans leur totalité, de façon holistique. « En les écoutant, on va plutôt considérer un pays entier plutôt que ses habitants, une communauté plutôt que les individus qui la composent ».
C'est ce qui donne à Auguste « le sentiment de faire partie d'un tout commun ». Pour Sarah, aussi, écouter de la techno en groupe donne « l’impression de retrouver la totalité de l’humanité ».
Une connexion à son environnement et à soi-même, comme l'explique Auguste : « Le corps entre en résonance avec la fréquence musicale. Les instincts endormis le reste de la journée remontent ainsi à la surface ».

Quel que soit le tempo, la musique produit de la sérotonine, un neuromédiateur présent dans tous les antidépresseurs, et sécrète des endorphines. Ce qui nous permet de danser toute la nuit sans ressentir de fatigue.
Voilà pourquoi Sarah, qui dépense de l'énergie sans compter, n'en ressent pas moins du plaisir, voire du réconfort dans l’effort : « Le son me berce et me transporte dans autre monde, où l’on se sent mieux. »

« La danse autour du feu du XXIème siècle »


Comment un son peut-il à la fois relaxer et stimuler ? Ceci s’explique par l’alternance de tensions et de résolutions. Explications du Dr Lemarquis : « La résolution signifie qu'un même thème est repris, que la musique se répète, ce qui calme et détend. Quand apparaît une tension, une différence dans les notes, les instruments ou le timbre, ça stimule ».

Des études ont démontré que la musique agit aussi sur l’ocytocine, une hormone déclenchée pendant l’accouchement, liée à l’attachement et à l’amour. « Cette hormone crée un sentiment de lien avec la musique en question, qui va faire partie de notre costume ».

C'est peut-être la raison pour laquelle Sarah trouve que « la musique crée une espèce de communauté utopique ». Même considération pour Auguste : « La techno a un côté tribal. On pourrait la considérer comme la danse autour du feu du XXIème siècle. »
Le Dr Lemarquis confirme ce parallèle entre les musiques électroniques et les musiques traditionnelles : « Amérindiens, Africains, Tibétains... Toutes leurs musiques sont répétitives, en adéquation avec le fonctionnement de l’univers. Planètes, mouvements des électrons, marées... Tout n’est que répétition. »

La musique, une drogue à part entière ?

Le plaisir ressenti à l'écoute de ces musiques répétitives peut entraîner une accoutumance, car « tout ce système est le même que celui mis en jeu par les drogues, admet le Dr Lemarquis. Ceci explique qu’une musique puisse continuer de circuler dans notre tête, même lorsqu’on ne l’entend plus ».

Faut-il pour autant associer les musiques électroniques à la consommation de certaines drogues ? « Si quelqu’un écoute une musique qui lui plaît et qu’il absorbe un produit en même temps, il peut y avoir une association, révèle le Dr Lemarquis. Mais cela fonctionne de la même manière si vous associez une boisson à un événement de votre vie. »

Le Dr Lemarquis met en garde contre l'usage de certaines drogues, qui « peuvent avoir des effets persistants, modifier nos secrétions de neuromédiateurs. Cela peut conduire à des psychoses, des troubles de la mémoire ou du caractère. Mais je ne pense pas que la musique va stimuler le système des addictions, ni le rendre plus performant. »

En effet, nul besoin de drogue pour se laisser entraîner par la techno. Pour s'évader, la musique se suffit à elle-même.*

*avec un ptit taz, c'est bien aussi


Sélection de trois autres articles sur le même sujet :

L’émotion de la musique décryptée. D’où provient le frisson musical ?
(synthèse d’un cycle de conférences septembre 2016)

Anhedonia to music and mu-opioids: Evidence from the administration of naltrexone (en anglais) :
comment le Naltrexone, antagoniste des opiacés qui bloque sélectivement les récepteurs opioïdes mu ôte tout plaisir d’écouter de la musique (février 2017)

L'anhédonie musicale : quand la musique ne procure aucun sentiment
(janvier 2017)

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Zero
Nouveau Psycho
Inscrit le 05 Aug 2017
111 messages
Très intéressant. Pour moi c'est clair que la musique est quelque chose de très important quand elle accompagne une prise de drogue, c'est ça qui peut littéralement faire partir en transe ! ou au contraire dans le pire des cas, conduire à un bad.

Tout le monde le sait, certaines musiques sont faites pour faire planer, qu'on soit sobre ou non, et ça c'est plutôt cool big_smile

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