28 heures

Catégorie : En passant
01 novembre 2025 à 11:39

#addicto #Crawing #héroïne #manque #oxycodone
Dehors, il fait nuit noire.

Je me pose devant mon bureau.

Playlist qui va bien dans mes écouteurs Bose (très important la qualité quand on pousse le volume je trouve)

Bien décidée à finir mon chapitre 14, je ne me sens pas trop mal, ça peut le faire.

Depuis hier midi, je n’ai rien pris, aucun oxy, ni LP ni oro. C’est cool.

Hier soir, je me suis tapé le spectacle des NRJ Music Awards (pour faire plaisir à mon fils). Je me dis que si j’ai survécu à ça, je peux survivre à tout.  C’est sûr, définitivement sûr.

Cette nuit, je me suis réveillée en nage, mais bon, rien de neuf sous le soleil, hein ? Je me lève, je me change et je refais mon lit…

Je ne craque pas. À la dure.

Je suis un bonhomme moi !

Je bois un café ce matin, ça peut passer, ça va aller…

Peut-être juste un petit… NON !

je vaux mieux que ça.

5 :40 : Ouai, c’est tôt… Je m’installe devant mon bureau.

J’ouvre ma fenêtre. Il caille.

Je me couvre.

J’ouvre mon ordi.

J’écris, les mots fusent, mon cerveau va plus vite que mes doigts, putain de clavier de m***e…

Je ferme la fenêtre.

Ben oui, forcément, ne plus penser à la came, c’est difficile quand on vit came, on respire came, et surtout qu’on écrit sur la came !!!

Mon heroïne commence à me faire suer… Franchement, quelle vie de m****e !

Zut c’est une bio, cette vie… c’est la mienne.

Je rouvre ma fenêtre. Il fait chaud ou c’est moi ?

C’est moi.

6 :30 : Franchement, un Oxy LP ça m’aidera vachement quand même…  ouep ?

J’avance super bien.

Parler de manque quand on l’est, c’est top.

Je suis mon propre cobaye.

Je l’ai toujours été. Je me déteste. Comme ça, c’est gratos.

7 :00 : A peine 7 heure ?

Je ferme ma fenêtre Je caille vraiment là.

Je file me faire une bouillote, y’a que ça qui me réchauffera.

7 :20 Je ne me réchauffe pas du tout. Ça empire.

Moi aussi, ouvrir ma fenêtre, ce n’était pas l’idée de l’année. J’ai refroidi la maison entière.

Je connais un truc qui pourrait bien marcher mais non … NON

Je fais bouillir de l’eau, une tisane…

Je réchauffe mes mains avec la tasse, la bouillote sur mes genoux.

Si je me mettais dans le lit ?

Ben non, faut que je le refasse encore une fois.

Ce matin, j’avais la flegme. J’ai encore trempé les draps après m’être rendormi. D’où les ouvertures intempestives de ma fenêtre…

7 :40 Allez je me reconcentre.

Le clavier de mon ordi en prend pour son grade.

Faut pas me faire chier aujourd’hui.

8 :00 record international, j’ai tenu 20 heures sans oxy

J’écris…

8 :10 : Zut mon fils est déjà levé !

Enfin, mon fils, mon boulet d’amour, comme je l’appelle.

Il a un petit truc en plus, comme on dit maintenant… 28 ans, un gros bébé, quoi.

Je lui fais son petit déj.

Les odeurs m’écœurent un peu, mais ça va.

Je me ressers un café.

Je lui donne ses médicaments.

Mince, la plaquette d’Oxy… NON

Il se cale devant le replay des musics NRJ Awards.

Il n’en a pas eu assez. Moi oui, je file dans ma chambre.

Puisque je suis en mouvement, je me donne un grand coup de pied au cul et je « re-refais » mon lit.

8 :30 J’ai l’impression de sortir d’un marathon.

Une douche s’impose. Flegme

Je me remets devant mon ordi.

Le lit m’invite gentiment… Je ne résiste pas, je prends mon ordi, ma souris, ma gourde et je me cale.

Je me réchauffe.

Mon nez commence à couler et j’ai mal au crâne.

Mince, je dois me lever pour aller chercher des Kleenex. Flegme.

Je pioche dans ma poche, sort un vestige, ça fera l’affaire.

J’écris.

9 :00 Mon fils débarque dans ma chambre.

Il veut faire sa croix sur le planning (son seul repère dans le temps).

Il entre dans mon lit, me fait un câlin.

Moment tendresse. Je craque.

Je l’aime trop, mon petit boulet. C’est lui qui me maintient en vie. C’est sûr et certain.

Je lui dois tout. On fait la croix. Il repart, satisfait.

9 :20 : J’ai du mal, en écrivant ma bio, je me prends en pleine face la réalité toute crue.

C’est moche.

Je pleure.

Je pleure beaucoup, beaucoup trop.

9 :40 toujours en proie à la mélancolie.

Humm… Je n’aime pas ça.

10 : 00 : 22 heures sans oxy… wow … j’ai fait ça moi ?

J’écris, mes pensées, fluides jusqu’à lors, commencent à devenir de plus en plus bizarres.

Pourquoi me faire du mal ?

J’ai fait quoi pour être punie ? Humm …

Les personnes qui me connaissent me disent qu’avec tout ce que j’ai subi, il y a une place pour moi au paradis.

La blague.

Lol, relol.

Mais ici… C’est quand que je respire ?

10 :30 Je prends du Doliprane. J’ai mal partout.

Je prends un peu de seresta, ça ne peut pas me faire de mal.

11 :00 C’est difficile, j’ai chaud, je sors du lit.

J’ouvre la fenêtre.

J’écris

Je ferme cette p***n de fenêtre.

12 :00 Désolée d’être vulgaire, mais j’en chie.

Mon fils débarque.
Je pense qu’il a faim… Mince

Je prépare vite fait un truc pendant que la tv diffuse… Si vous suivez, vous savez quoi.

Filet de cabillaud, petits pois carotte, c’est pas mal.

13 : 00 C’est l’heure du « câlin » on se pose sur le canap avec mon fils.

J’ai du mal à rester en place ; je prends sur moi.

Je lui demande s’il veut sortir se balader dans l’aprem mais c’est un grand non et ça m’arrange bien.

13 :30 Je me recale devant mon ordi, le chapitre avance difficilement.

J’essaie de transcrire une idée : A force de mettre des trucs sous le tapis, ben… Y’a une bosse de plus en plus grande et je me casse la gueule parce que je bute dessus quand je passe, vous avez l’image ?

Bon, c’est nul, je laisse tomber.

14 :00 rosy vient de faire l’amour avec Nino, voilà une scène qui fait du bien…
Souvenirs…

Quelques larmes…

Putain de mélancolie.

Je me lève et je tire la caisse de médicaments de mon placard du couloir.

Je compte ce qu’il me reste, pour l’énième fois…

Wow ça sent la fin.

Je range la boite.

Je me rassois devant l’ordi.

Je change de playlist ; je cherche un truc plus punchy.

15 :00  J’en ai marre. Dire qu’en juin j’avais réussi… Après 2 mois de galère, mais bon, j’avais réussi…

4 ans d’oxy non-stop, quand même, c’est pas rien.

Bah … je peux le refaire

15 :30 je croque dans une pomme.

Dehors, il pleut comme vache qui pisse.

Je me lève pour aller aux toilettes et mettre une lessive en route.

De retour, je m’arrête devant le placard.

Je sors la boite.

Pour l’héroïsme, on verra plus tard… 

Je vais demander de l’aide, j’en ai marre.

Je dégage d’abord un comprimé de LP puis 6 Oro de leur blister…

Je vais téléphoner à l’addicto que mon infectiologue m’a donné.

Il m’a m’aider.

Je pose les comprimés sur mon bureau.
—    Allo ? Bonjour, je voudrais un rdv svp.
—    Oui, là nous sommes sur des délais d’un mois, un mois ½… C’est pour quels produits ?
—    Ben… Un peu d’héro, de l’oxycodone et un peu d’alcool aussi.
—    … je peux vous rappeler dès que j’aurai un créneau disponible ?
—    Ha… ok… faisons ça.

Je suis à Toulouse, bon sang, pas au fin fond de la Lozère !!

C’est juste dingue…

Bah, on verra bien.

16 :00 Je m’enfile tous les comprimés, je bois de l’eau.

J’aurai tenu 28 loooongues heures.

Commentaires

marycora a écrit

Pourquoi me faire du mal ?

J’ai fait quoi pour être punie ? Humm …

Salut,

je trouve que c'est les questions fondamentales...

ce n'est pas parce qu'on a consommé qu'il faut expier, qu'il faut se punir pour moi !
il n'y a pas de mal, surtout quand on reconnais aussi les bénéfices, on reconnait qu'on l'a fait car ça nous apportait ce qu'on cherchait. Et personne ne merite de se punir, de se faire du mal pour ça...

Et sur moi, c'est clair que la punition ça ne marche pas. Ca me donne envie juste de ne plus me respecter...d'envoyer tout balader.
Alors que reconnaitre mes besoins, chercher comment ne pas souffrir, voire même profiter m'aide à me canaliser, à vouloir baisser la tolérance sans me priver, sans me flageller. Car la privation, la punition, le chatiment, cette course à être plus fort que l'instinct humain à ne pas suffrir, est carrément contreproductif pour moi. Certes, ça a l'avantage de l'appréciation sociale, de bien s'inscrire dans une morale chrétienne de culpabilité et abstinence...mais encore ?

Après tout dépend de ce que l'on cherche...mais je trouve que se faire du bien ne passe pas par se faire du mal. Ces images du prix gagné dans la souffrance ne sont que des constructions qui me desservent. Parfois certes, obtenir ce que je veux ça passe aussi par faire des trucs chiants, pour arriver à l'objectif il faut par fois en chier, mais en chier ce n'est pas mon objectif ! Et j'ai bien compris que limiter au maximum le sacrifice pour le sacrifice me laisse plein d'energie à adresser vers là où je veux ! Sans le mettre à devoir "tenir" à tout prix...

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