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86e jour sur 94 



1/ Contexte
J'ai décidé de faire une pause de plusieurs mois avec la codéine à partir de fin novembre, la dernière prise remonte au 26 novembre exactement (CWE de 270mg)

Cette pause a pour but de diminuer ma tolérance afin de pleinement apprécier les effets à la reprise.
J'ai déjà fais des pauses de 2 mois, ce qui donne un bon résultat à ce niveau, et j'ai décidé d'aller à 3 mois cette fois ci, donc rien en décembre, janvier et février.
Ce qui fait donc 3 mois plein soit 90 jours (année non bissextile)

Il reste 1 renouvellement à mon ordonnance et en la gardant chez moi je n'aurais clairement pas tenu aussi longtemps à mon avis, je l'ai donc placée hors de portée, ce qui a été une très bonne décision.


2/ Pauses précédentes
Lors de mes pauses précédentes de 2 mois je n'avais pas d'ordonnance valide sous la main, j'attendais donc assez avant d'aller voir mon médecin.
En cas de renouvellement restant j'ai du tenir maximum 3-4 semaines, sachant que de se lever avec le papier tout prêt est un peu comme avoir son paquet de gâteau préféré dans le placard : j'y pense en boucle, c'est pas tenable sans craquer dans la durée.
Le plaisir était au rendez vous après 3 semaines mais pas autant qu'en cas de pause plus longue, de loin.

Je n'ai pas une tolérance énorme non plus, en gros j'arrive à garder sous contrôle mon objectif  en restant en moyenne à 240mg en cas de longue pause, si je reprend plus tôt j'augmente le dosage jusque 300 ou 330mg.
ça marche très bien en augmentant mais ça diminue le nombre de sessions possibles + ça me gonfle de faire ce compromis alors qu'il "suffit" juste d'être patient.
C'est un peu de l'auto arnaque.



3/ Etapes
Lors de ces 85 jours j'ai pu analyser mon rapport au craving, ou à l'envie de codéine avec ses hauts et ses bas, c'est pourquoi je crée ce blog afin de me relire plus tard et me souvenir des étapes mentales par lesquelles je suis passé.
Peut-être que ça pourra aussi intéresser ou motiver d'autres personnes qui sait.

les 4 jours terminant novembre se passent bien, je les vois un peu comme un échauffement avant de réellement commencer, j'ai surtout cette notion de 3 mois = 90 jours en tête, ça fait un compte facile.

Au bout de 2 semaines vers le 10 décembre je sens une envie de consommer qui me prends, cette envie s'étend plusieurs jours et c'est typiquement là ou je serais allé à la pharmacie si j'avais eu l'ordonnance sous la main.
Je me dit que cette idée de ne pas pouvoir accéder au papier est vraiment utile, parce que je ne peux rien faire concrètement.
Il me faudrait faire un trajet assez long pour la récupérer et même si je partais sur un coup de tête ça serait vraiment un échec d'y aller à ce moment là, donc bonne probabilité de faire demi tour en cours de route.
Ce verrou mental est vraiment pratique je trouve, l'envie est passée en quelques jours et même si je pense souvent au produit c'est davantage mon rapport à celui ci que j'examine.
Les fêtes de fin d'année arrivent, je bois un peu d'alcool (j'ai diminué ma consommation aussi depuis début décembre)

1er Janvier je sens une petite victoire, hop 1 mois de fait!
Je m'étais dit que craquer avant 1 mois serait un échec, à partir de 2 mois c passable, et à 3 mois expérience réussie.
Donc c'est plutôt cool de commencer l'année sur une note positive, ça me motive et je décide de limiter drastiquement l'alcool, je suis "tout ou rien" niveau tempérament donc ça se passe bien au jour d'aujourd'hui (20 février) je n'ai bu que 3 fois sans excès depuis le 1er janvier.

Mi janvier approche et c'est là que j'ai ressenti vraiment le craving.
En retournant le truc dans tous les sens je pense que le fait d'arriver à 45 jours donc la moitié du total, me mettait en position ou le plus gros était fait, et psychologiquement ça voulait dire que l'heure de la récré était plus proche, ce qui me fait trépigner d'avance.
Et quand ce genre de façon de penser se met en place chez moi c'est assez difficile de penser à autre chose.
Je me disais que 45 jours quand même c'est pas mal, ça permet une baisse de ma tolérance qui commence à être intéressante et que 240mg me feraient un bon effet.
Je me disais que j'avais passé le 1er mois donc déjà je n'étais plus dans la case "échec" si je reprenais là.
Mais il n'était pas question de céder à mi parcours, en plus je pensais à mon résultat collatéral avec l'alcool et je ne voulais pas dévier de cette bonne voie.
Là encore avoir l'ordonnance loin de mes pattes m'a beaucoup aidé.

Cette forte envie a bien duré 10 jours.
J'ai vraiment examiné mon rapport aux drogues à ce moment là, j'ai repensé à mon parcours la dedans depuis le milieu des années 90, à toutes les extrémités et inconsciences dans lesquelles j'ai pu me jeter.
La codéine est de loin une des substances les moins problématiques à plein de niveau pour moi, le fait de ne pas pouvoir en métaboliser au delà de 500-600mg mets une première limite dans l'escalade, rien à voir avec l'héroïne par exemple.
Le fait d'avoir des effets largement diminués en cas d'utilisation trop fréquente mets une autre limite, j'estime qu'en dessous de 4-5 jours c'est du gâchis.
Le fait de ne pas pouvoir redrop efficacement est clairement un avantage pour quelqu'un qui veut pouvoir gérer une consommation.
Le fait de ne pas pouvoir l'injecter également.

A l'époque de la vente libre j'en prenais 300mg une fois par semaine, par contre je ne faisais pas vraiment de pauses et avec le temps ça me faisait plus trop d'effet, rien de comparable avec un reset significatif de tolérance.
Ce coup de faire des pauses est venu en partie avec la nécessité de voir un médecin pour en obtenir, je n'aime pas devoir exagérer pour obtenir ce que je veux, tout comme je n'aime pas courir les médecins.
C'est un mal pour un bien dans mon cas.

Une fois ces 10 jours passés je me suis senti vraiment bien, satisfait de ma détermination, et j'ai décidé de me pencher sur mon alimentation et mon activité physique (toujours ce côté "tout ou rien" chez moi)
Je me suis organisé des repas plus sains et une grille d'exercices simples par semaine : pompes, footing... sans forcer juste histoire d'être en forme.

On arrive début février, moment que je redoutais car ça faisait 2 mois sur 3 et correspondait à mes précédentes longues pauses, qui avaient donné de bons résultats.
Reprendre à ce moment là devenait acceptable quelque part et la pensée de cet état de défonce, ce rush de chaleur cotonneuse et de plaisir me trottait gentiment dans la tête...
Au final ce cap est passé tranquillement, le fait de m'être fixé des objectifs de remise en forme a aussi aidé à renforcer mon état d'esprit.
Et puis février c'est le mois le plus court, 28 jours cette année soit pile 4 semaines.

J'accumule toutes ces petites raisons pour voir les choses du bon côté, je réalise aussi que d'avoir un plan (améliorer ma condition physique, manger équilibré) est un levier très intéressant pour rester motivé.


4/ Bilan au 86e jour
On arrive aujourd'hui au 20 février, dans 9 jours ma date cible sera atteinte, et je pense que je vais déborder au delà.
Déjà autant aller à 100 jours, psychologiquement rien que pour le nombre c'est cool :)
Ensuite je verrai petit à petit suivant mon évolution physique, parce que clairement là je suis en très bonne voie, je veux dire j'ai une vie saine et une clarté d'esprit comme ça fait longtemps que je n'ai pas eu, j'ai presque l'impression de rajeunir et ça fait vraiment du bien...
Et je n'ai pas du tout envie de remettre ça en jeu de suite, ce serait vraiment dommage.
Peut-être que je ferais quelques jours de plus, peut-être que je tiendrais jusque fin mars?
Il y a tout à gagner à attendre dans cet état d'esprit, encore moins de tolérance, 180-210mg devraient faire un bon effet à ce moment là.
Lors de la fin de la vente libre je n'avais pas pu avoir pendant 10 mois environ, ça m'a complètement décalqué avec 300mg, c'était vraiment trop (j'estime qu'un reset "total" pour moi se situe donc en dessous de 10 mois, sûrement qu'à 6 mois ça m'aurait fait pareil)

A suivre :)

Catégorie : Expérimental - 20 février 2022 à  13:23

#codéine #motivation #tolérance



Commentaires
#1 Posté par : cependant 20 février 2022 à  18:44
Salut,

ton billet me parle car les pauses que j'ai faites par le passé n'avaient que le but de limiter ma tolérance.

Concernant un autre produit, j'ai arrêté en faisant une pause aussi (mais la molécule n'est pas comparable : c'était le cannabis), c'est à dire que je ne me sentais pas du tout de dire « j'arrête » (et encore moins pour toujours !), ça passait bien mieux dans ma tête de me dire « je fais une petite pause ». Naturellement je pense que ça a joué pas mal le fait comme tu dis de la préparer cette pause, mettre en place des stratégies de substitution/gestion des cravings.
Bref, j'avais commencé par une pause de 8j, puis c'est devenu 2 semaines, puis 1 mois, puis 2, puis 6, puis un an, puis je n'avais plus envie de fumer en fait. Ce qui n'était pas rien vu mes 15 années de conso quasi quotidiennes.

Mais les opiacés pour moi, ce n'est pas la même !
J'ai d'ailleurs fini par remplacer ma défonce quotidienne au cannabis par des opiacés (et j'ai l'impression que je m'y retrouve pas mal).

Mais je me demandais, à l'époque de ta pause, c'était de combien ta conso ?
Toujours 300mg/semaine ?
Effectivement à ce dosage je n'ai jamais développé de dépendance physique...mais la donné change pas mal en développant une dépendance au produit. Au moins pour moi...
Car ça été bien plus facile gérer aisément des pauses de conso sans dépendance, car une fois développée, ça a été plus compliqué de faire des pauses...(car pause ça voulait dire un long tappering pour moi, vu que ça a toujours été hors de question de m'infliger un arrêt brutal des consos et faire un sevrage sec). Et à force de prolonger la diminution, ça a été plus compliqué ne pas avoir envie de consommer avant d'avoir totalement réduit. Et donc, concrètement de faire des pauses...

Quels avantages tu tires de ta pause (je veux dire en plus de la baisse de la tolérance) ?

J'espère que tu atteindra tes objectifs :)

 
#2 Posté par : artag 21 février 2022 à  12:02
Salut,

En effet à aucun moment le but de ma démarche n'a été d'arrêter totalement, j'aime vraiment beaucoup la codéine et pour moi c'est l'opiacé le mieux adapté à une consommation sous contrôle.

C'est la décharge de bien être + le long plateau (le tout dans les 2h quand bien fait après une longue pause + toute la journée sur un petit nuage) que je veux retrouver régulièrement.
Je trouve qu'avec le bon set and setting et une faible tolérance le rush est sans problème au niveau d'une très bonne came, sans les conséquences potentielles qu'implique une consommation d'héroïne.

Quand je dis "conséquences" je parle au niveau de l'accroche, de la possibilité de redrop ou d'injecter, et aussi sur le plan financier.
Tout le monde ne pense pas comme moi et il y a de nombreux témoignages sur ce forum comme quoi la codéine peut amener les même problèmes et dépendance, mais d'après mon expérience c'est vraiment incomparable et beaucoup plus safe.
Même en en consommant tous les jours pendant des semaines à l'arrêt ça ne me fait quasi rien, c'est vraiment anecdotique, alors que quelques jours de bonne came et je suis cloué au lit 72h à suer et avoir des courbatures partout.

Ton expérience d'arrêt du cannabis me parle ça ressemble à ce que je suis en train de faire  un peu oui.
D'ailleurs je me surprends à trouver des "excuses" pour repousser le moment ou je vais reconsommer :
- "autant aller à 100 jours, ça fait que 6 en plus"
- "pourquoi pas pousser jusqu'au 21 mars pour le printemps?"
- "bon après autant aller jusque avril il restera rien et ça fera 1 mois de bonus par rapport au plan initial"

C'est le même processus que quand on trouve des petits prétextes ou justifications à une conso, il y a toujours une bonne raison!
Je n'aurais jamais imaginé que cette façon de penser puisse se mettre en place pour repousser une prise de produit, et pourtant.

cependant a écrit

Mais je me demandais, à l'époque de ta pause, c'était de combien ta conso ?
Toujours 300mg/semaine ?

En fait en règle générale j'essaye de rester au maximum sur 240mg par session tout en ayant de bons effets, mais vu que j'avais peu espacé dernièrement j'ai monté ces dosages et diminué les sessions.
ça a donné 3x240, 1x330, 2x300 et 1x270 pour terminer, le tout sur environ 1 mois (je note tout, ça m'aide aussi à mieux me rendre compte)

C'est une autre raison pour laquelle j'ai voulu faire une pause plus longue que d'habitude, je ne voulais pas que ça commence à déraper, il fallait que ces "excès" soient isolés et repartir comme avant.
7 fois en 1 mois c'est trop surtout en augmentant les doses, clairement y'a du gâchis (autant en stock qu'en plage totale de défonce possible)
Sur le moment je m'en fous pas mal, je profite, mais rétrospectivement ça soule de se dire que j'aurais eu de meilleures sensations juste en étant un peu patient, et avec des dosages plus faibles qui plus est.


cependant a écrit

Effectivement à ce dosage je n'ai jamais développé de dépendance physique...mais la donné change pas mal en développant une dépendance au produit.

Pour ton rapport à la dépendance physique je le comprends si je compare avec d'autres produits, mais comme je disais en début de message je ne l'ai jamais ressenti avec la codéine.
Comme quoi une preuve de plus que chacun est différent.

J'ai pourtant essayé d'en abuser à l'époque de la vente libre mais en fait ça sert à rien pour moi, tout diminue trop vite pour que ça reste intéressant à consommer quotidiennement et même dans le cas en cas d'arrêt brutal j'ai juste une journée un peu différente comme quand on arrête une habitude et c'est tout.
Si j'en consomme plusieurs jours d'affilé la tolérance grimpe trop vite et je me retrouve avec un semblant de montée de 15mn au bout d'une semaine et même pas vraiment de plateau (tout en ayant doublé les dosages), ça sert à rien je trouve.
C'est un très gros avantage pour garder un contrôle de mon point de vue puisque abuser ne me mène nul part, au contraire.


cependant a écrit

Quels avantages tu tires de ta pause (je veux dire en plus de la baisse de la tolérance) ?

Concernant les avantages de ma pause, je dirais en premier la satisfaction de voir que j'arrive à en faire une déjà, c'est assez gratifiant.
Ensuite cette pause en particulier a des répercussions bénéfiques sur mon mode de vie, alimentation, sport, conso d'alcool (ça n'était pas forcément du tout le cas des pauses précédentes)

C'est aussi pour ça que je repousse la reprise, je préfère essayer d'ancrer les bonnes habitudes que j'ai mises en place ces dernières semaines pour ne pas tout bousiller en reprenant de la codéine trop vite et me laissant aller à picoler et bouffer n'importe quoi par exemple, choses que j'adore faire une fois défoncé :)

Actuellement c'est trop frais et fragile, je pense que si je reprends là ma routine risque d'être chamboulée et elle me fait trop de bien pour que je prenne ce risque.
Donc je vais essayer d'attendre un peu, et quand je sentirai que c'est jouable de rester à 1 fois par semaine par exemple (plutôt que de me prendre les pieds dans le tapis comme la dernière fois à 7x en 1 mois), là je réfléchirais à un plan :)


cependant a écrit

J'espère que tu atteindra tes objectifs :)

Je te souhaite également de trouver un angle d'attaque pour réduire/espacer si tu le souhaites! Pas évident quand on est dans un cycle de dépendance à quelque chose.


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