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À Toi, ma Sœur 



Ma Sœur

Aujourd’hui j’écoute Gigi d’Agostino, tu sais, l’album que tu préférais.
Je me souviens que tu dansais, tu dansais… et on riait. On se regardait dans le miroir, on faisait des grimaces à la con, et on jouait comme des gamines.
Quand j’ai eu 14 ans j’ai commencé à boire avec toi, malibu, vodka.
Bourrée tu te cognais sur les murs de la maison, et Papa criait, criait.
J’ai suivi le même chemin que toi. Ensemble on trainait dans les bars et les boites de nuit. A 16 ans j’avais bu 100L et demi. Quand tu étais ivre tu criais comme Papa. Je te reconnaissais plus, pour moi c’était pas toi.
En boîte tu t’allongeais par terre. T’avais pas de limite, j’avais juste le droit de me taire. Tu conduisais avec 3g 5. On se marrait sans avoir conscience du danger, mainte fois t’aurais pu nous tuer.
Le lendemain à la maison tu te pointais avec 5 bières fortes et tu disais « allez, on trinque ». Quand on mangeais en famille tu descendais les verres de vin.
Moi je buvais comme toi, mais mon truc c’était le shit. Pour planer, planer. Pour que ça monte plus vite.
17 ans je passe mon bac. Je suis defoncee en cours. Je suis dehors tous les soirs. Chez toi ça devient le QG du milieu gay lyonnais.
Tu finis par arriver en retard au travail. Agent de sécu dans une grosse boîte, ça passe pas quand tu manques l’ouverture.
Ma mère est démunie et ne sait plus quoi faire. Elle pleure et te dit qu’il faut que tu te soignes.
Puis vient la partie dramatique de l’affaire.
Tu fais un premier sevrage forcé qui te rends malheureuse. Tu as du mal à quitter ta copine, tu bois en cachette, tu rencontres en douce.
Tu te formes au métier de factrice, tu t’entends bien avec tes collègues mais au premier barbeuc tu finis à poil dans la piscine.
Tes meufs supportent pas ton alcoolisme. C. finit par te quitter, ce qui pour toi est très violent. Tu t’automutiles je vois bien que tu souffres. Mais il faut que je me prenne en main, et je suis trop fragile pour te tendre la main.
Ivre encore au boulot, haleine de goulot. Ils te font souffler dans le ballon, connaissais-tu tes droits ? Atteinte à la dignité, ton chef te respecte pas.
Avant d’aller en cure tu es à 3l de vin et 2bieres par jour. Enfin tu t’aides toi même, tu fais une thérapie, tu revis.
Quelques mois.
Au travail tu fais des remplacements à te crever. Tu travailles trop dur, trop fort, pour des carottes, des prunes, des promesses en l’air. Tout le monde t’adore t’es la mascotte du bureau. Sauf que toi, tu sens les conséquences sur ton corps, t’en a plein le dos.
Ta copine vit sur Paris et t’acceptes mal la distance. Tu noue un lien avec une fille qui profites de toi et t’initie au plaisir du cannabis.
Un soir un joint, coupe ou pas, réveille ta psychose endormie.
Tu te rends à l’hôpital, tu cries à l’aide et tu finis attachée dans un lit.
Pendant 7 jours en isolement, tu n’as plus confiance en personne. En plein délire de filiation, les petites voix qui résonnent.
Depuis ton internement, tu nous a maudits. Pour toi on t’avait trahie.
C’est le soir de Noël que l’événement funeste est arrivé. Après les fêtes tu devais rentrer à l’hosto, mais tu as dévié. T’es partie chez toi, t’as garé ta voiture correctement, t’as rangé tes cadeaux.
Puis t’as gobé les 2 plaquettes de valium prescrites par ton kiné. T’avais prévenu ta meuf, elle a fait ce qu’elle a pu.
Elle a juste eu le temps de t’entendre dire « je t’aime » et c’était trop tard. T’as sauté du 6e, t’es décédée 5 min plus tard.


Catégorie : Tranche de vie - 20 février 2022 à  16:47

Reputation de ce commentaire
 
Très touchant



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