Naissance de l'analyse pour la RdR à distance - épisode 3, transgression 



En septembre 2020 nous partageons ce projet avec l'équipe de PA: désormais nous serons plus nombreux à porter ce projet. L'engouement collectif donne de l'énergie. Puis lors d'un rendez vous avec l'OFDT, on annonce en fin de réunion que nous avons une machine HPLC et que on a comme projet de créer un dispositif d'analyse à distance. S'en suis un grand silence.
Nous avons transgressé une ligne invisible. Le projet est maintenant officiel

L'achat de la machine HPLC d'occasion sera suivi par l'achat du nécessaire pour la rénover, suivant les conseils du spécialiste suisse. A la fin de l'année 2020, je finis la rénovation de la config HPLC. Elle passe un ensemble de tests définis qui garantissent qu'elle est en état de produire des analyses dans les limites techniques officielles fixées: elle peut servir à produire des analyses répondant aux critères de qualité. Toute la machine fonctionne, ormis le détecteur, je dois en trouver un autre, et suis les ventes aux enchères pendant les mois qui suivront. Le marché du matériel médical ou de chimie est mondialisé. Des industriels sont spécialisés dans le rachat de vieux équipements et leur revente. Et ils revendent à qui peut acheter. Le premier achat venait d'Allemagne, les suivant viendront de Finlande, du Danemark, d'Angleterre, de Singapour, des Etats-Unis. Si la config principale a été acheté d'occasion à réviser, j'achète par contre toutes les pièces nécessaires à la rénovation et l'entretien neuves. Il nous manque encore le logiciel spécialisé nécessaire, qui coute normalement plusieurs milliers d'euros. Je trouverai début 2021 un contact avec un commercial d'une marque de réference dans un pays d'europe du nord, qui revend sur le net pour arrondir ses fins de mois des ordis portables d'occasion avec le logiciel adapté, dans sa version avec toutes les options. Je lui achète un ordi avec le logiciel et une licence pour moins de mille euros.

Nous continuons au début de 2021 à rencontrer des acteurs de l'addictologie pour voir exister notre projet. Les réponses que nous trouvons sont abruptes et contrastées. Des acteurs privés sont pret à le financer, mais nous sommes plutot réticent à un partenariat avec un industriel de la pharmacie, même si il est intéressé par la RdR. Les structures institutionnelles, par contre, sont plus que réticentes voire hostiles. Quand on explique le dispositif que l'ont veut créer, on découvre ainsi ce que les pros imaginent de nous. Par exemple, quand on explique que on veut publier les résultats au fur et à mesure sur internet, on comprend de certains pros qu'ils imaginent que on veut publier en temps réel les résultats avec leur emplacement géographique, c'est à dire: "analyse cocaïne, achetée à 18h au croisement de la rue machin et de l'avenue bidule, 94% cocaine et 6% levamisol". on dirait qu'ils nous imaginent incompétents, irresponsables, et s'imaginent sans doute en miroir les seuls compétents et détenteurs d'une expertise que nous, "drogués" et intervenants en autosupport, nous ne pourrions atteindre par principe, je dirais meme par « nature ».

lors des journées de la federation addiction, nous publions dans le fanzine un éditorial écrit par Pierre de plaidoyer pour l'analyse quantitative qui agitera tout le congrès. Ce coup de gueule produit beaucoup d'effets, pendant deux jours presque tous les acteurs de l'addictologie présent passeront au stand de Psychoactif pour discuter, jusqu'à un responsable de la DGS. Ce coup de communication s’appuie sur tout le savoir faire de Pierre en la matière, mais aussi sur la place acquise par Psychoactif, sur son influence politique effective, concrète, réelle

C'est aussi la prise de conscience de ce que créé la config HPLC qu'on a. Elle ne produit pas des analyses, pour l'instant en tout cas. Elle symbolise l'expertise de la science, et en se retrouvant hors de ses institutions de réference, elle créée un espace politique. Un espace politique qui nous permet de penser des actions au delà du champ dans lequel elles étaient avant limitées. Elle crée pour nous de l'empowerment, elle nous permet de nous penser acteurs là ou les professionnels de l'addiction ne nous pensent le plus souvent que comme patients. Elle nous permet de nous émanciper de notre condition. Elle oblige tous les acteurs dont le champ d'expertise est contesté à se positionner. Elle remet en question les fondements de leur expertise. Elle démonte des stéréotypes, en nous et en eux, et change les rapports de force

Elle fait bouger les choses.


Catégorie : Carnet de bord - 06 mars 2024 à  23:53

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Merci d'avoir transgressé cette ligne invisible. PTX.



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