[sociologie] Du besoin de disparaître de soi

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groovie
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Illustration Antoine Doré





Cette article évoque les refuges de l'humanoïde moderne, notamment dans l'utilisation de psychotropes ou dans l'apparition de troubles psychiatriques. Je pense qu'il peut aider certaines personnes ici à mieux comprendre pourquoi la consommation de drogues est aussi agréable, un moment que l'on se donne à soi, un certain isolement psychique et physique.

Dans la même veine je vous conseil l'épisode de "black mirror" Nosedive (s03e01) qui est axé sur les réseaux sociaux dans une dystopie où il est possible de noter des êtres humains de 1 à 5 étoiles comme de vulgaires auberges.




ARTICLE LE TEMPS


Du besoin de disparaître de soi

Le sociologue David Le Breton explique à quel point le besoin de nous effacer devient urgent et vital



«La blancheur est un engourdissement, un laisser-tomber né de la difficulté à transformer les choses.» Professeur de sociologie à l’Université de Strasbourg, David Le Breton est hanté depuis des années par le thème de la «blancheur». A savoir l’envie de disparaître lorsqu’on arrive à saturation, la tentation d’échapper à la difficulté d’être soi dans un monde de contrôle, de vitesse, de performance, d’apparences. Selon lui, cet état touche de plus en plus de monde. Qu’il soit conscient – marche, yoga, méditation, jardinage – ou involontaire – burn-out, dépression, alcoolisme, personnalités multiples, maladie d’Alzheimer.

David Le Breton: Certaines personnes y échappent car elles sont bien dans leur peau, dans leur vie. Elles ont une vie accomplie qui les mène selon leurs rythmes. Sans doute aussi ont-elles des loisirs qui leur permettent de manière modérée de se détendre de toutes les tensions. Quelqu’un qui lit, marche, jardine régulièrement… Ce sont des manières paisibles de disparaître. La personne n’aura pas l’impression de s’effacer d’elle-même. Mais une majorité de nos contemporains est dans ce fardeau d’être soi qui amène à une volonté de lâcher prise.

rès souvent, j’entends ces paroles: «J’aimerais disparaître un moment, qu’on ne s’occupe plus de moi…» Je pense qu’il y a vingt ou trente ans, on n’aurait jamais dit ça. Nous avions des responsabilités sociales qui restaient encore à la hauteur de nos compétences. Maintenant, nous sommes dans la nécessité constante de montrer que nous sommes à la hauteur. Le portable vient nous traquer dans nos moments de repos. Dans les trains, les gens crient au téléphone et racontent leur vie. Le silence devient plus rare. Un temps, il était possible de faire une sieste dans le train. Maintenant tout un univers de sonneries nous rappelle à l’ordre. On finit par craquer.

– La blancheur se définit-elle différemment chez les ados, les adultes et les personnes âgées?

– Je situe la blancheur parmi les conduites à risques de nos jeunes. Ces jeunes en errance qui disparaissent du lien social. On retrouve la blancheur dans la toxicomanie, etc. Que des millions de jeunes Occidentaux boivent, non pas pour l’ivresse, mais pour ne plus être là, c’est très révélateur. Il y a aussi les troubles alimentaires, comme l’anorexie, et l’émergence des Hikikomori, ces ados qui s’isolent dans leur chambre et n’en sortent pas pendant des années, comme s’ils étaient des moines technologiques. Ils sont en lien avec les réseaux sociaux, mais ne supportent plus les liens de visage à visage, de corps à corps. Ils ont besoin de la médiation de l’écran pour aseptiser le risque de la rencontre.

"Internet a resserré la pression sur des milliards d’individus, provoquant le burn-out dans le monde du travail"

Si la blancheur touche les jeunes de façon particulière, elle touche autant les personnes âgées à travers Alzheimer, ou différentes formes de démence. Mais aussi des adultes en pleine possession de leurs moyens, à travers la dépression, le burn-out… En écrivant ce livre, j’ai eu envie d’évoquer ce qui est au cœur de la littérature et du cinéma depuis des années. J’ai été frappé par l’émergence spectaculaire de cette thématique de la blancheur, dans une société où s’absenter de soi-même paraît le comble de l’improbable. On est en permanence dans l’exigence d’être soi-même, de se personnaliser, de montrer qu’on est à la hauteur etc.


– Les nouvelles technologies ont donc accéléré ce que vous nommez l’engourdissement généralisé?

– Oui… Il n’y a pas si longtemps, environ une vingtaine d’années, quand on était en voyage, on écrivait juste une carte postale. On rentrait avec énormément de choses à dire, à raconter. Aujourd’hui les touristes pianotent en permanence sur leur portable pour dire à leurs proches «c’est génial». Ce qui banalise la sacralité du monde. Il n’y a plus besoin de journal intime, le SMS banalise les événements.

On est souvent aussi contraint de lire ses mails tous les jours… Il n’y a plus de possibilité de repli. Comme le dit très bien l’écrivain Emil Cioran: «Nous avons été dépossédés de tout, même du désert». Cette phrase me hante depuis toujours. J’ai vu progressivement cette zone d’intimité se réduire. Et finalement, même quand vous décidez de ne pas jouer le jeu, vous êtes poursuivi par ceux qui continuent. Internet a resserré la pression sur des milliards d’individus, provoquant le burn-out dans le monde du travail. On appelle les gens au milieu de leurs vacances, le soir… C’est la technologie de la traque.


– Vous parlez du voyage comme une «suspension joyeuse de soi». Mais puisqu’il est si difficile de tirer la prise, le voyage entre-t-il vraiment dans la catégorie de la disparition?


– Tout dépend de la philosophie du voyageur. L’expérience montre que quand on a un rendez-vous dans une journée, toute la journée est organisée autour de ce rendez-vous, donc vous perdez la main sur votre existence. La marche est peut-être la manière la plus démocratique pour retrouver des moments de paix, d’harmonie, de disparition de soi. Mais une disparition de soi mesurée. On part quelques heures ou quelques jours, et les portables ont souvent du mal à fonctionner dans les endroits isolés. L’immense succès sociologique de la marche tient à cette suspension des contraintes de l’identité. Sur les sentiers, plus personne ne sait qui vous êtes, vous n’avez de compte à rendre à personne. Vous marchez à votre rythme, vous vous arrêtez… Personne ne vous rappelle à l’ordre pour un rendement que vous devez accomplir.
Des millions de gens cherchent ce moyen de tenir le coup, de résister

Le succès du jardinage est aussi lié à ça. C’est un phénomène sociologique spectaculaire. Planter des carottes pendant une heure est une manière saisissante de disparaître. D’être là sans être là. C’est reprendre le contrôle d’une existence qui, la plupart du temps, nous échappe complètement. En même temps, votre pensée va battre la campagne. L’univers intérieur voltige dans tous les sens.

– Le fait de s’aménager des moments de «disparition de soi» évite-t-il la «blancheur» négative?


– Oui! On voit se développer le yoga, la méditation, les stages de silence en monastère… Des millions de gens cherchent ce moyen de tenir le coup, de résister. Certaines personnes choisissent de s’installer dans des conditions de survie, par lassitude du monde. C’est une solitude choisie, et évidemment il y a aussi celle qui s’impose, avec l’isolement contraint. Mais beaucoup de nos contemporains cherchent la solitude, car ils sont saturés d’un lien social qui devient exaspérant.

Lire aussi: En pleine tyrannie des réseaux sociaux, peut-on encore sortir seul?


– Pouvez-vous imaginer une prise de conscience? Les gens vont-ils faire machine arrière?


– J’analyse justement l’engouement pour la marche comme un phénomène de résistance. Une manière de refuser les contraintes de l’urgence, du rendement, de la vitesse. Beaucoup de magazines avertissent nos contemporains de la nécessité de vivre à leur rythme. L’éloge de la lenteur, le slow food etc. On est environné de signaux qui nous disent de reprendre le goût de vivre, de profiter de nos enfants, de nos proches. En même temps, les formes de management du travail n’ont jamais été aussi agressives. Et les technologies viennent nous saisir là où on voulait avoir un moment de repos. Comme si on se prêtait à une servitude volontaire. En ville, j’ai l’impression d’être le seul à regarder le monde autour de moi. Les autres regardent leurs écrans. Ça ne peut que se retourner contre les individus à un moment ou un autre.


Source :
https://www.letemps.ch/societe/2016/07/ … gn=article

Camille Destraz (journaliste) et David Le Breton (sociologue voir livre: 
«Disparaître de soi – une tentation contemporaine». Ed. Métailié, 208 pages. )


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ElSabio homme
Antifa...narchiste
Inscrit le 02 Dec 2016
1288 messages
Bonjour,


Une analyse assez lucide sur nos sociétés que je partage largement, sans être pessimiste, comment tout cela évoluera-t-il dans l'avenir pour que le plus grand nombre y trouve son compte et ne soit pas oublié en chemin ?

Merci pour l'article Groov'. super


Bien amicalement.

« La liberté des autres, étend la mienne à l'infini ».
Mikhaïl Bakounine

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Kinozore homme
Nouveau Psycho
Inscrit le 15 Jun 2017
88 messages
Hey !

Merci pour ce post c'était super intéressant de lire tout ça.
Si j'aurai pu te mettre un champignon vert je l'aurais fais.

Cette société, ce monde, nous même et le temps qui évolue, les progrès technique de notre société nous mène à une déshumanisation vitale
Je déteste cette génération d'apparence , d'illusion et même moi je suis obligé d'en faire partie et de m'adapter
Mais dans le fond heureusement qu'il existe certaine personne qui ont conscience de ce qu'ils se passent... On se sent moins seule!

Rien ne se perd / Rien ne se crée
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Cynder homme
: )
Inscrit le 25 Jul 2017
378 messages
Putain c'est quoi ce forum : )

Des gens, des cervelles allumées...?

Ou suis-je?

J'écrirais un post plus constructif plus tard, mais en attendant merci pour le partage.
Bise


Cynder

"Je suis un pack de bien-pensance."

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Kinozore homme
Nouveau Psycho
Inscrit le 15 Jun 2017
88 messages
Heyyy je viens tout juste de rentrer de tawa !

Pour vous dire j'ai passé ma nuit sous XTC

C'est l'une de mes premières soirées où le produit était super bien passé, sans problème !


Krokodil Lacoste...
J'étais épuisé par mon après midi en salle de sport et j'avais un peu le ventre vite , les effets sont montés en 30 minutes !

Je me suis ensuite rendus devant le son pour taper et là boom décollage imminent vers l'extasee...

Ne faut - il pas avoir mal pour ressentir du bien ? super intéressant ce genre de débat je trouve avec " jamais d'arc en ciel sans un peu de pluie "

Le film culte " Fight Club " est en rapport avec tout ceci et tout cela, nos illusions de la vie, j'apprécie ce film et ce combat contre soit même , contre Tyler Durden, ce mec dont on rêve tous d'être !

Recherche d'identité, non je n'y suis toujours pas.. Je ne sais pas qui je suis, je ne me connais pas tellement et sous prods toute la vérité éclate au yeux.. : la réalité c'est que tout est apparence ici, l'humain est bon mais parfois très mauvais

J'ai ressentie une sensation très étrange lors de ma prise d'ectasy toute à l'heure,
Je sais pas si  c'est déjà arrivé à quelqu'un de pouvoir se griffer le corps, la tête, en ayant l'envie d'en effet " disparaître "

disparaître car on se déteste comme ça, mais que la réalité ou du moins la société est entravé par les réseaux , la mode, et les groupes d'appartenances changent, ils deviennent électronique et qui sait... dans 50 ou 60 qui nous dis que c'est pas nous qui allons devenir " éléctronique " et " dirigé "

Je me suis sentie atteint, et pour le paradoxe les redescentes me rendent très nostalgique et souvent je déprime à cause de la solitude et de mes sauts d'humeur...
Je suis sans doute dans ce moment précis "heureux" au final , en attendant que je redescende...

Je pense que quand on est sur le point de mourir ce qui nous soulage est de ne pas être seule sur ce lit... Mais me semble - il qu'on prenne tous un sourire tellement rassurant en étant mourrant
comme si toute ces années à vivre ont suffit à nous purger dans la mort afin d'accéder à un monde de paix
il est là le paradis, dans la mort, dans l'accomplissement d'une vie et surtout quand on est vieux ça doit être choquant de se revoir dans le temps d'avant et d'aujourd'hui

Ça doit être en effet très nostalgique que le sourire qui nous échappent quand on meurt reflète une vie entière sur cette planète bondés de fou....

peut être aussi rassurant qu'une prise de sédatifs ou de béquilles pour ne pas oublier qu'on est pas des machines à travail , pour simplement pouvoir se sentir libéré et pouvoir souffler... cette génération nous voile la face! notre VRAIE face...

bref je me suis peut être un peu emporté dans mes récits mais en tout cas une chose est sûr c'est que cette drogue permet de se connaître mieux soi même et connaître mieux les gens autours de nous , ok je vais me taper des tiques nerveux par moment mais sans dec, l'envie de disparaître y était bel et bien mentale et je connais bien ce sentiment d'angoisse sociale... de pression sociale... je sais pas le terme exact mais voilà, comme dis dans le post, je résiste !

un peu de codéine serait le bienvenue pour assumer les pics de montée et descente de sérotonine... mon dieu je me vois déjà être bipolaire, non il faut pas y penser...

bonne continuation à tous les poto on y arrivera un jour, un jour on se sentira enfin accomplie pour de bon,
pendant ce temps continuons nos efforts, pour pouvoir vivre, dans ce monde de taré!

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