Malade du sida depuis 1989, bénéficiaire de l'AAH depuis 1994 pour un montant qui s'élève aujourd'hui à 743,63 Euros, je milite à Act Up-Paris depuis 2003.
À l´occasion du 1er décembre, journée mondiale de lutte contre le sida, j'invite toutes les personnes vivant avec le VIH, leurs proches, toutes les personnes et structures qui combattent la pandémie à entrer en campagne pour 2012, afin d'imposer dans les débats politiques les priorités des droits des personnes et de la santé contre les logiques d'austérité budgétaire, de répression et d'ordre moral.
Rendez-vous Jeudi 1er décembre - 18 h 30 - Bastille
Depuis que l'UMP est au pouvoir, les personnes gravement malades et/ou handicapées ont été stigmatisées, accusées de creuser les déficits, ponctionnées d'impôts sur la maladie (forfait à un euro, franchises médicale) au point que beaucoup d'entre nous ont renoncé à se soigner, et attendent une évolution gravissime de l'infection pour consulter. Nos droits sociaux sont en berne. Comme moi, un séropo sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté. Pourtant, l'UMP repart en guerre contre nous au point que Laurent Wauquiez vient insulter toutes les personnes handicapées qui ne peuvent travailler et dépendent de la solidarité nationale en les traitant de « cancer de la société » qu'il faudrait « responsabiliser ».
La haine d'Etat ne concerne pas que les malades. Les étrangErEs, les prostituéEs et travailleurSEs du sexe, les usagErEs de drogues sont aussi des cibles privilégiées des politiques de l'UMP. La haine d'état rend les conditions de vie des populations épouvantables et le travail de prévention, de dépistage, d'accès aux soins et aux droits quasi-impossibles. Et le parti au pouvoir s'acharne à faire des gays, lesbiennes, bi et trans des sous-citoyenNEs qui n'auraient pas les mêmes droits. Avec des conséquences indicibles sur nos vies, et après nos morts.
N´étant pas l´ayant droit de Christian, mon compagnon de vie durant dix-huit ans, je n´ai pu organiser ses funérailles, du fait que le mariage nous est interdit. De plus, les séropositifs sont toujours maintenus dans un décret de 1998 qui empêche les soins post-mortem. Cette société qui nous parle de respect ne respecte pas nos morts. Elle m´a imposée de donner un baiser à la mort, car il est resté 13 jours dans un frigo de l´institut médico-légal et était insupportablement abîmé.
Quant aux malades du monde entier, celles et ceux des pays pauvres à qui les pays riches avaient promis l'accès universel aux traitements, ils et elles ont été sacrifiéEs aux bénéfices des banques et des traders. 0,2 % du plan de sauvetage bancaire de 2008 aurait suffi à changer la donne et sauver des millions de vies. Et un vrai soutien aux génériques dans le monde aurait permis de réduire le coût des traitements. Aujourd'hui, 15 000 personnes meurent encore du sida, abandonnées par les pays riches, dont la France de Sarkozy.
Nous entrons donc en campagne pour contrer la haine de l'UMP à notre égard. Pour autant, nous n'accordons aucun blanc-seing aux partis de l'opposition présidentielle. Comment peut-on refuser pour 2012 de dépénaliser, réguler et légaliser les drogues quand on sait l'échec d'une guerre coûteuse à la drogue et son impact terrible sur la santé des personnes ? Comment envisager de mettre les prostituéEs et les travailleurSEs du sexe encore plus dans la précarité en pénalisant leurs clients quand on sait que cette mesure bloquera un peu plus le travail de prévention et d'accès aux droits ? Ces deux exemples le montrent : la vigilance à l'égard de tous les candidatEs s'impose.
Le sida est une épidémie politique. On peut la vaincre avec de la volonté. C'est la raison pour laquelle nous entrons en campagne, et que nous vous invitons à nous rejoindre. Non-jugement, droits, auto-support, démocratie directe, participation des malades et des usagErEs aux institutions, santé communautaire : la lutte contre le sida est riche d'expériences qui ont su profiter à tous et toutes. Celles et ceux qui entendent nous représenter en 2012 doivent en tenir compte, et cesser de parler de sujets qu'ils et elles ne maîtrisent pas sans consulter les personnes les plus concernées par les décisions qu'ils et elles défendent.
Si vous pensez, comme moi, comme nous, que nos vies, nos droits, notre santé doivent passer avant les bénéfices des banques et des labos, avant la démagogie sécuritaire et répressive, avant l´ordre moral ; si vous voulez en finir avec les logiques de fatalité qu'on nous oppose dès que nous demandons un monde de justice et de solidarité ; alors rejoignez-nous.
Et parce que la démocratie ne commence ni ne se termine dans l'isoloir, mais bien dans la rue, nous invitons les lecteurRICEs qui le peuvent à nous rejoindre lors de nos manifestations ce 1er décembre.
Source :
http://blogs.mediapart.fr/edition/sida- … a-campagne