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décro à  la " normande" ou comment certains non UD voient les UD 



Bonjour,

J'écris ce post pour raconter une anecdote qui, à  mon sens, décrit bien la manière dont l'usage de dope peut être perçu par quelqu'un qui est étranger à  cet univers.
C'était il y a quelques années. J'avais rencontré Erwan, originaire de Caen, qui était alors infirmier chargé de la chimiothérapie des enfants atteints de leucémie dans un hôpital assez connu.
Nous avons noué une relation et en raison de mes principes de l'époque j'avais décidé d'opter pour la franchise maximale. Je lui ai donc révélé mon traitement à  la métha.

Au bout de quelques mois de relation, il me "propose" un sevrage à  la "chinoise".
La pression aidant, entre autres choses, je décide de tenter. J'étais alors à  60 mg de métha.

Monsieur décide donc de s'occuper de tout. Il achète du sirop, prépare les bouteilles, les seringues pour le dosage.

Les deux premiers jours tout va bien. Le troisième je devais passer la nuit dans mon appartement, donc il me file une fiole préparée que j'avale avant de partir.
Arrivée chez moi je passe la journée bizarrement et vers 3h du matin c'est le drame. Le manque m'assaillit, je transpire comme un marathonien, j'ai parfois froid, parfois chaud, le transit et les jambes n'en parlons pas.
Là  je me dis que je suis vraiment mal alors je réfléchis.
Je me souviens du moment où Erwan a préparé la mixture, il ne l'a pas fait devant moi.
Je me souviens aussi des réflexions sur la came en bon moralisateur. Là  je me dis qu'il m'a escroqué en bonne poire.
Je l'appelle une vingtaine de fois. Il ne répond pas. Au dernier appel je lui laisse un message :
- "t'as intérêt à  être réveillé car j'arrive avec la perceuse"
Et me voilà  sur la route avec ma polo à  rouler comme une inconsciente pour me rendre chez Erwan. Quelle souffrance !
Devant sa porte, une clope dans une main et la mallette Bosch dans l'autre, je sonne.
Bizarrement, il m'ouvre. Je rentre telle une furie avec comme seule phrase :
- donne moi ma métha !
- mais tu l'as eu chéri, la prochaine c'est demain matin
- donne moi ma métha j'te dis !!!!
Là  il me donne une fiole non diluée. Il me regarde comme un idiot le temps que le produit agisse. Moi :
- tu as essayé de m'arnaquer
- non pourquoi tu dis ça
- Alors sois t'es con et alors on peut s'inquiéter des chimio que tu prodigue soit t'es un enfoiré
- bon ça va t'es peut être tombée sur l'une des fioles placebo
Là  j'en revenais pas. Le gars en face de moi il s'est dit, tranquille, que, tel un scientifique, il pourrait tester l'effet placebo sur moi à  un dosage de 60 mg surpris
Il a  dû avoir une fulgurance intellectuelle du genre "mais çà  doit être comme le mal de ventre où on donne un smartie blanc au lieu d'un spasfon aux gamins qui veulent pas aller à  l'école" ou encore "il faut serrer les dents un bon coup jusqu'à  ce que ça passe"

C'est extraordinaire de la part d'un membre d'une équipe soignante.
Il faut dire qu'il adorait se mettre des mines avec, au minimum, une bouteille de Gin et quelques verres de vin quotidiennement. Parfois il prenait des barbituriques. Mais vous comprenez c'est légal !!! Alors que les camés sont mal vus par la société. D'ailleurs il m'avait dit un jour : "t'aurais pas pu faire comme tout le monde et picoler ?"
Un soir, il m'avait demandé, lors de discussions sur mes consommations d'héro, si j'avais pratiqué la prostitution. Logique ! D'ailleurs, il avait du mal à  croire que je n'y avais jamais eu recours.
J'ai eu le droit à  mon lot de clichés et de jugements de toutes sortes.
Je pense avec le recul que si Erwan avait "consenti" à  entamer une relation avec moi c'est en raison de mes études bien plus longues que les siennes. Et dans son esprit et sa vision monolithique des choses il s'est dit que ça collait pas avec l'image du "tox". Donc ça allait pas. Il s'est dit alors "suffit de supprimer la métha et elle sera au top" logique là  encore !

Catégorie : Témoignages - 31 mars 2016 à  20:29

#méthadone



Commentaires
#1 Posté par : Syam 31 mars 2016 à  22:12
Oui ce qui est vraiment révoltant dans les histoires -nombreuses- dans ce genre qu'on entend c'est comment dès que vous consommez, quelqu'un se situe comme tellement supérieur qu'il sait mieux que vous tout ce qui est bon pour vous. Comme s'ils étaient dans la confidence, comme si ils savaient un secret sur la drogue. C'est le sentiment qu'ont la plupart des gens à  force d'entendre les imbécilités du journal télévisé sur les drogues.

Le mécanisme est classique, on répète aux gens que l'héro ou le crack c'est mal. Or ce que les gens entendent tous les jours ils finissent paradoxalement par penser qu'ils ont eut l'idée eux-mêmes et s'en trouvent très intelligents - et dès qu'ils peuvent la mettre en application, les voilà  qui se prennent pour des génies de la science ou de la médecine qui vont pouvoir vous aider mieux que des addictologues.

Tes principes sont tout à  ton honneur, mais quand il s'agit de conso, une illustration de plus qu'il ne faut pas en parler. Il faut d'abord s'assurer que la personne a un état d'esprit parfaitement ouvert sur le sujet, lui faire d'abord lire des choses intéressantes comme le parc au rat etc. et voir ce qu'il en dit. S'il est évident que la personne a un peu d'humilité devant l'expérience des autres, alors il est possible d'aborder le sujet plus personnellement.

 
#2 Posté par : PAI 01 avril 2016 à  11:04
Salut wavy,

Sacré aventure qu'il t'es arrivée là  !

Le problème avec certains non UD c qu'ils pensent nous aider (et je doute pas qu'ils le souhaite) alors qu'ils feraient mieux de s'abstenir.

  Il y a les grandes lignes qui sont communes a beaucoup d'entres nous, mais il y a aussi l'histoire propre a chacun, l'histoire sans et avec produit(s).

Et le fait que chacune de nos histoires soit singulières complique encore un peu plus la tache de ces croisés contre la drogue et ses utilisateurs.

Avoir un bon accompagnement de ses proches est très important, pas de doutes, mais la famille doit rester a sa place.

La famille touche a l'affect, sujet délicat pour des personnes ultra sensible comme le sont beaucoup d'entres nous.
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Tres bonne analyse. Pierre

 
#3 Posté par : pierre 01 avril 2016 à  11:53
Il faut se méfier comme la peste des personnes qui veulent nous sauver pour notre bien... C'est pour le moins tres louche.

Et quand ils arrivent pas à  nous faire arrêter, ils deviennent des persecuteurs...

 
#4 Posté par : away 01 avril 2016 à  19:30
Bonsoir les Psychos,

Wavy2, merci.
ça...la stigmatisation d'éléments sociaux, ils savent s'y prendre pour manipuler les gens. J'en reviens souvent à  cette phrase mais : dans le monde du travail, presque tous les jours j'entends parler mes collègues de bureau sur ce/ces sujets...entre Haine (oui carrément) et clichetons dans 95% des cas...C'est juste hallucinant.

Away
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pareil dans mon travail

 
#5 Posté par : Viegroo Senior du turfu 01 avril 2016 à  23:09
Un placebo...pendant un sevrage...avec un opiacé aussi fort?
mais c'est de la folie ! Si le sevrage physique n'existait pas on le saurait, à  quoi est ce que cet infirmier était entrain de jouer? o_o
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la folie c'est le mot ! wavy

 
#6 Posté par : bighorsse 02 avril 2016 à  02:24
conclusion :ne jamais confier sa deccro à  tout autre qu un medecin habilité à  le faire !
melanger amour et emprise sur son addiction est catastrophique ...
pas brillant  l erwan !

 
#7 Posté par : wavy2 02 avril 2016 à  19:30
Bonsoir les psychos !

Merci à  tous pour vos commentaires !
Je n'y ai lu que des analyses pertinentes.
Il est terrible qu'aujourd'hui on puisse encore avoir une méconnaissance aussi répandue de ce qu'est l'addiction et au dessus de tout ça de ce qu'est le fait de se tourner vers l'usage de substances.

Les clichés circulent, durcissent et nous en subissons les conséquences. En ce qui me concerne ce n'est pas grave, je me débrouille, j'ai traversé des moments difficiles mais ce n'est pas dramatique.
Je pense à  ceux qui subissent de plein fouet le jugement général, les mauvaises pratiques, le rouleau compresseur social, politique et économique.
Un site comme celui-ci est d'une grande aide, j'en mesure de plus en plus la qualité, la richesse.

Et oui décrocher pour quelqu'un n'est une solution loin de là .
Laisser son sevrage aux mains de quelqu'un et surtout celui-là , était une décision totalement irrationnelle.
Aujourd'hui mon compagnon actuel que j'aime profondément ne sait rien de mon traitement ni de mon histoire avec les produits. Et pourtant je ressens pour lui ce que jamais je n'ai ressenti pour personne. C'est juste que cette partie de ma vie ne concerne que moi.
J'ai intégré naturellement que gérer son traitement ou les produits est une chose mais gérer les autres et leur inférence est tout autre chose et ça même s'ils vous souhaite le meilleur..

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