Blogs » cependant » 

les baffes de la vie : réveil violent d'inconscience 



Besoin de raconter.
Panique, peur et flip : faut les faire sortir.
Perdue dans mes perceptions, sans certitude de la réalité.

Plus d'un mois déjà hors de chez moi, langue étrangère aux oreilles.

Bloquée dans les flots, sur une île lointaine, je m'apaise plus dans les pochons à la poudre claire que dans le brouah des vagues remouées par les vents.

Et le vin arrose la vie qui n'est pas toujours rose.
Les rayons sur les nuages teintent la rosée des nuits eveillées, la lune qui se lève au petit matin, l'écume sur les rochers et le numéro à apeller pour se retrouver au quartier.

À l'horizon le port indus scintille, les cargos attendent. Et moi j'espère dans un bateau sans aucune hâte de revenir à la normale.

Pêcheuse d'avenir incertain, sur la route les rencontres sont multiples et aléatoires.

On devait rentrer, alors on remonte au port.
On a les contacts pour choper ce qu'il nous faut.

Amitiés de rue, autant déracinées que des amarages provisoires sur des quais branlants.

On nous invitent à dîner et, enfin, prendre une douche chaude.

Appart dans la vieille ville, ruelles en pierres entortillées à l'ancienne chapelle. L'humidité tache les murs, le mobilier est essentiel.

On entame la came, on boit des verres, on goute aux plats. Ça rigole et ça bichonne. Le rouleau d'alu s'amenuise, les traces s'enchainent. On a une reduc à pécho plus, la tentation est forte, hop cinqs pochons dans la main.

Nous dansons sur les notes des mauvaises musiques latines, les rires éclatent, selfies immortalés autour de la table instable.

Cependant, je suis épuisée d'une journée qui m'a noirci un oeil.

Une aprèm dans les ruines romaines, sans heroine. Sécurités sentimentales qui s'écroulent, je prends sur moi sans savoir d'où vient la haine qui l'anime. Je prends en pleine gueule les tasses qui volent. Ça défigure mon état d'insouciance amoureuse. Ça éclate mes élans de joie. Ça brise ma confiance aveugle. J'y gagne un oeil tumefié. C'était pas fait exprès, mais ça me blesse le coeur encore plus que l'épiderme bleutée.
Pourtant on repart.
On se retrouve dans ce repas partagé.

Repus, l'énième alu, un digio et un joint.
Je ne veux pas fumer. Après quinze ans constants sous cannabis, j'ai regouté aux joies paranos de la difficulté de vivre qui me donne maintenant un joint.

https://image.freepik.com/photos-gratuite/homme-se-suicide-par-surdose-medicaments-gros-plan-pilules-surdosage_43284-967.jpg

Nos hôtes insistent, on va rigoler. Le tarpé est déjà roulé,  en cône parfait. Ils me passent le spliff, je finis par y tirer deux taffes sous l'insistance.
Ils le passent à mon pote, qui n'a pas arrêté de s'acharner à chasser le dragon perpétuel. Lui non plus ne voudrait pas fumer, il connait déjà cette beuh syntetique bien cheloue. Cependant, il fume des grandes taffes.

L'effet du joint monte pour moi et je vois les yeux de mon pote partir en couille.
Il me dit être bien trop défoncé.
Je le capte. La parano cannabinoque monte en moi, je me demande si nos hôtes improvisés n'ont pas prévu le coup pour nous dépouille.

Mon pote a l'air de plus en plus à l'ouest.
La came coupée au fenta, l'alcool à flots, l'herbe synthétique.
Il finit par s'endormir sur la chaise.

D'un coup, il tombe révulsé de la chaise.

J'essaie de l'attraper. Je l'appelle d'abord doucement puis plus fort.
Il ne répond plus.
Je le secoue, je demande de l'eau pour son visage.
Je continue à l'appeler sans réponse, la respiration faiblit.
Je l'ai dans les bras. J'essaie de le caler en PLS.

Des longues minutes passent sans qu'il réagisse.
Les hôtes prennent le poux, je panique.
Ils veulent appeler les pompiers.

Je ne sais plus quoi faire, je donne des gifles pour qu'il se réveille. Derrière moi ils me demandent si appeller les secours.
Je pense aux cours de secourisme, je m'en veux d'avoir oublié quoi faire. Je me souviens juste qu'il vaut mieux casser une côte dans un massage cardiaque, plutôt que la personne ne respire plus. Je comprends maintenant que ça n'a rien à voir, mais je perds mes moyens avec le corps inanimé de mon pote dans mes mains. Je ne sais plus quoi faire pour le reveiller de son inconscient. Les images d'une pote laissée crever d'OD dans une voiture en banlieue me hantent. Je dois faire quelque chose.

Je donne des baffes désespérées pour qu'il reprenne conscience. Je ne comprends pas sur le moment que sûrement je claque trop fort mes mains contres ses joues dans l'espoir de ne pas le voir partir dans une ambulance (que dans ce pays étranger veut dire aussi flics, enquête et emmerdes en tant qu'ud). Je met toute ma force pour le voir résurgir.

Je m'arrête dès que ses yeux se rouvrent.

Mais c'est trop tard.

Dans son cerveau le trou noir opère.
Il se croit en plein rue, avec des gens qui le dépouillent et le tabassent.

Il me roue dessous avec une haine méconnaissable, ses yeux démoniaques me poursuivent. Je ne sais pas s'il me reconnait.

Moi je ne capte rien. À peine soulagée de le voir sortir de l'inconscient qu'il faut que je me sauve. Les hôtes essaient de le maîtriser. La table trébuche sous les coups, les verres volent en éclats, les bouteilles saignent leur vin sur le sol. Leurs bras le clouent au sol pour qu'il ne me poursuive pas.

Il se rendort à nouveau. La rage disparaît.

Il reste les débris à nettoyer. L'appartement à ranger.
Mon coeur à panser. Il croit que je l'ai fait exprès, pour me défouler d'hier. Ça me harasse.
Je ne peux pas m'en vouloir. Mais j'ai peut-être mal réagis sous la panique.

La crainte d'une prochaine fois ça me fous en vrac.

Catégorie : Tranche de vie - 23 avril 2021 à  15:09



Commentaires
#1 Posté par : anonyme 710 24 avril 2021 à  12:26
Salut,

Outre le fait que ton écris soit réellement plaisant à lire, j'emmet certaines reserves quant à la véracité de ton récit.

Une personne en situation d'overdose ne se réveillera jamais, surtout au fentanyl ; un coma à 4-6 sur l'ech de Glasgow (juste avant la mort cérébral) doit se traiter avec un antidote et/ou une ventilation assitée, des outils qu'on trouve en service de réa.

Et la "rage" que tu décrit fait préssentir qu'une dose de naloxone à été injecté par un personnel à proximité, mais tu n'en fait pas mention. De même, la ressurgence de la somnolence est caractéristique de la courte demi-vie de la naloxone.

Mais en tout cas, j'ai vraiment apprécié ton texte, et si cela s'est vraiment passé comme tu le décris, ta réaction l'a peut être sauvé ; et comme tu le dis, mieux vaux le blesser physiquement que le voir mourir sous tes yeux.

La bise,

Az

 
#2 Posté par : cependant 24 avril 2021 à  15:15
Salut,

anonyme 710 a écrit

Une personne en situation d'overdose ne se réveillera jamais, surtout au fentanyl ; un coma à 4-6 sur l'ech de Glasgow (juste avant la mort cérébral) doit se traiter avec un antidote et/ou une ventilation assitée, des outils qu'on trouve en service de réa.

Et la "rage" que tu décrit fait préssentir qu'une dose de naloxone à été injecté par un personnel à proximité, mais tu n'en fait pas mention. De même, la ressurgence de la somnolence est caractéristique de la courte demi-vie de la naloxone.

Mais en tout cas, j'ai vraiment apprécié ton texte, et si cela s'est vraiment passé comme tu le décris, ta réaction l'a peut être sauvé ; et comme tu le dis, mieux vaux le blesser physiquement que le voir mourir sous tes yeux.

La bise,

Az

Merci pour ton commentaire !

En fait je pense que mon pote a perdu connaissance sans que ce soit une vraie OD...mais j'ai paniqué...

En effet pas de naloxone à disposition sad

Le fait que j'ai fumé un joint bien chimique avant je crois ça ne m'a pas aidé à garder le controle. Le fait qu'il y a deux inconnus avec moi non plus.

J'ai flippé...j'en ai longuement parlé avec mon pote après...

Je trouve que c'est très difficile de jaujer dans des situations d'urgence, ni sous estimer (avec des conséquences parfois mortelles) soit sur estimer (avec des conséquences traumatiques, on va dire)

Toi ça t'es arrivé d'être confronté à une situation comme ça ?


 
#3 Posté par : anonyme 710 24 avril 2021 à  16:27

cependant a écrit

Salut,

anonyme 710 a écrit

Une personne en situation d'overdose ne se réveillera jamais, surtout au fentanyl ; un coma à 4-6 sur l'ech de Glasgow (juste avant la mort cérébral) doit se traiter avec un antidote et/ou une ventilation assitée, des outils qu'on trouve en service de réa.

Et la "rage" que tu décrit fait préssentir qu'une dose de naloxone à été injecté par un personnel à proximité, mais tu n'en fait pas mention. De même, la ressurgence de la somnolence est caractéristique de la courte demi-vie de la naloxone.

Mais en tout cas, j'ai vraiment apprécié ton texte, et si cela s'est vraiment passé comme tu le décris, ta réaction l'a peut être sauvé ; et comme tu le dis, mieux vaux le blesser physiquement que le voir mourir sous tes yeux.

La bise,

Az

Merci pour ton commentaire !

En fait je pense que mon pote a perdu connaissance sans que ce soit une vraie OD...mais j'ai paniqué...

En effet pas de naloxone à disposition sad

Le fait que j'ai fumé un joint bien chimique avant je crois ça ne m'a pas aidé à garder le controle. Le fait qu'il y a deux inconnus avec moi non plus.

J'ai flippé...j'en ai longuement parlé avec mon pote après...

Je trouve que c'est très difficile de jaujer dans des situations d'urgence, ni sous estimer (avec des conséquences parfois mortelles) soit sur estimer (avec des conséquences traumatiques, on va dire)

Toi ça t'es arrivé d'être confronté à une situation comme ça ?

Je comprends mieux, mais ton reflexe à tout de même était remarquable. L'essentiel était qu'il reprennes conscience, et sur ce coup la, c'est une réussite.

J'ai vu un ami à moi faire une OD au fentanyl. Heuresement qu'il y avais de la naloxone vraiment à côté et j'ai pu faire les gestes que j'ai apris. Si tu veux t'en procurer, ça s'appelle Prenoxad.

Je suis rester assez serein honnêtement. Sans doute que le fait d'avoir de la naloxone à porter de mains à jouer énormément.

En tout cas, même si ton jugement était altérer par la situation, ton geste, même si discutable, à permis de lui éviter bien des souffrances.


 
#4 Posté par : cependant 24 avril 2021 à  18:01
Salut,

Oui la gestion du stress est quand même essentielle, mais quand nous même on est dans un état altérée c'est pas évident...

Oui, j'ai du nalscue à la maison, là je suis à l'etranger, encore plus difficile qu'en France d'obtenir de la naloxone...

De toute façon, avec le recul je crois que c'etait plus une espèce de malaise vagal du à la beuh synthétique qu'une surdose d'opiacées (même s'il y avait eue une bonne conso de came+alcool, d'où le flip aussi)

En tout cas, malgré tout je m'en veut pas, mais j'espère avoir quand même appris des choses et ne pas refaire les mêmes erreurs et je garde une certaine sensation de peur...

 
#5 Posté par : Stelli 24 avril 2021 à  19:28
Suivant la quantité de fentanyl absorbée le Prenoxad peut ne pas suffire malheureusement... Il faut parfois des quantités considérables de naloxone IV pour   voir la personne revenir, et effectivement vu sa courte durée d’action, il faut répéter les administrations (ou poser une SAP avec IV en continu).

Dans ce cas précis je crois (sans pouvoir être certaine...) que c’est plus l’association des produits que le fentanyl lui même, qui a provoqué le malaise.

Cependant tu n’as pas à t’en vouloir, ce sont des choses qui arrivent. Tu ne l’as pas laissé tomber, tu as fait ce que tu as pu, malgré ton état.

Juste, ta vie actuelle ne semble pas te convenir, du moins c’est ce que je ressens au travers de tes écrits ici. Peut-être devrais-tu réfléchir à changer ce qui te dérange le plus? Ce qui te fait du mal? J’ai bien conscience que ce n’est pas si simple, mais parfois on a besoin de tourner certaines pages, et d’avancer.

Prends soin de toi.
Reputation de ce commentaire
 
merci

 
#6 Posté par : cependant 24 avril 2021 à  20:06
Merci beaucoup Stelli de ton message

Stelli a écrit

Dans ce cas précis je crois (sans pouvoir être certaine...) que c’est plus l’association des produits que le fentanyl lui même, qui a provoqué le malaise.

C'est ça je crois aussi après coup...d'autant plus que cette histoire de fenta ce n'est pas du tout prouvé par des analyses ou quoi (juste sur la base des effets)

Stelli a écrit

Juste, ravie actuelle ne semble pas te convenir, du moins c’est ce que je ressens au travers de tes écrits ici. Peut-être devrais-tu réfléchir à changer ce qui te dérange le plus? Ce qui te fait du mal? J’ai bien conscience que ce n’est pas si simple, mais parfois on a besoin de tourner certaines pages, et d’avancer.

Prends soin de toi.

Disons que c'est compliqué...ça en fait des changements dernièrement mais justement je me questionne sur leur direction...
En plus c'est plutôt de la tristesse due à la tombée des illusions...tout était tellement bien que je galerais à y croire...et la déception ça fait mal...


 
#7 Posté par : Stelli 24 avril 2021 à  20:10

cependant a écrit

En plus c'est plutôt de la tristesse due à la tombée des illusions...tout était tellement bien que je galerais à y croire...et la déception ça fait mal...

Je comprends je connais...


 
#8 Posté par : Morning Glory 24 avril 2021 à  20:19
Ouai du courage... période pas facile...

 
#9 Posté par : cependant 26 avril 2021 à  12:01

Morning Glory a écrit

Ouai du courage... période pas facile...

Merci MG,
Pas facile, mais intense, avec des belles choses aussi...des hauts et des bas
Jusqu'aux étoiles et retour !


D'ailleurs, ça va comment pour toi ?
J'espère bien...
Du courage à toi aussi !


Remonter

Pied de page des forums