Contraventionnalisation : Communiqué du Syndicat de la magistrature

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Gilda
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Drogues et réduction des risques : l’Etat déclare forfait



Communiqué de presse du Syndicat de la magistrature en réaction à la publication du rapport de la mission d’information relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants


« Cette mission n’a pas pour objet de réfléchir à la lutte contre la toxicomanie ou la réforme de la loi du 31 décembre 1970 ». Délivrée en préambule de la présentation du rapport, la précision est stupéfiante mais a le mérite de la lucidité.

La mission d’information relative à l’application d’une procédure d’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants assume ainsi son rôle réel : entériner les mesures déjà annoncées au printemps par Gérard Collomb, sans réflexion d’ensemble sur les drogues, ni ambition sanitaire ou sociale. Au prix de contorsions invraisemblables, de contradictions de motifs même, le rapport conclut en faveur de l’amende forfaitaire. Et sans surprise, Gérard Collomb confirme ce matin l’intention gouvernementale de forfaitiser ce délit.

Cette procédure n’est pas, comme on l’entend trop souvent, une voie de dépénalisation mais bien un moyen de répression plus systématique, qui ménage la possibilité de prononcer des peines d’emprisonnement. L’approche répressive du traitement des drogues demeure, alors que la fonction dissuasive de la peine en la matière est depuis longtemps invalidée.

Inconséquent, le rapport produit sa propre contre-argumentation en constatant l’impossibilité de mettre en œuvre la forfaitisation en l’état, l’inapplicabilité – et c’est heureux – aux mineurs et le caractère très limité du gain de temps pour la police et la justice.

Dans notre droit depuis 2016, la fausse bonne idée de l’amende forfaitaire délictuelle n’a jamais été utilisée en raison d’obstacles techniques et juridiques. Le rapport conclut donc à l’extension d’une mesure déjà inapplicable.

Pour donner l’illusion d’une individualisation possible, les rapporteurs recommandent que le procureur de la République puisse, dans ses instructions de politique pénale, définir les profils de consommateurs pour lesquels les agents établiront une procédure classique. Une proposition très haut perchée : ainsi donc, les policiers interpellateurs orienteraient la procédure, sans aucun contrôle de l’autorité judiciaire, après une « consultation de rue », contexte si propice à l’évaluation des risques associés à la consommation.

Les contradictions se poursuivent. Conscients du caractère disproportionné d’une répression délictuelle, les rapporteurs proposent eux-mêmes une amende de 150 à 200 euros, proche du tarif contraventionnel.

Les effets inégalitaires inéluctables de la mesure sont, quant à eux, assumés par les rapporteurs qui constatent la surreprésentation de certaines catégories de consommateurs, ceux des quartiers populaires, dans les interpellations et les poursuites. Ils balayent l’injustice d’un tarif indifférent au niveau de ressources financières des personnes, le tout pour des effets bénéfiques en terme d’arrêt de consommation complètement fantasmés.

Des deux rapporteurs, le plus « audacieux » propose que l’amende forfaitaire soit délivrée dans un cadre contraventionnel, ce qui comporte au moins la petite avancée de supprimer une peine de prison encourue faisant de la France une des quelques exceptions en Europe. Mais il ne tranche pas entre la contravention de 4ème classe et celle de 5ème classe, que quelques détails - loin d’être mineurs mais totalement absents du rapport - différencient pourtant : applicable ou non aux mineurs, contrôlée par l’officier du ministère public ou le procureur de la République, inscrite ou non au fichier des antécédents judiciaires (TAJ)…

Comprenant sans doute que la solution proposée n’en est pas une, les rapporteurs préconisent prudemment de la mettre en œuvre par la voie de l’expérimentation dans une cour d’appel pendant deux ans, et renvoient sine die à une nouvelle mission d’information pour les mineurs, plus vulnérables aux produits mais dont la santé attendra. De manière générale, le rapport passe sous silence les développements essentiels des approches de la réduction des risques. En voilà une révolution dans la politique des drogues…

Les travaux n’ont servi qu’un agenda politique : celui du ministère de l’Intérieur. Il a exclu de fait la véritable réponse : la dépénalisation de l’usage et même, la légalisation des drogues dans un cadre contrôlé. A l’heure où de nombreux pays adoptent des législations en ce sens et les Nations Unies une résolution pour engager les Etats à favoriser les alternatives aux peines, la France s’enlise seule dans une voie qui ne mène nulle part. Elle persiste dans l’impasse d’une répression pénale aussi intraitable qu’impuissante, qui relègue la véritable solution, sanitaire et sociale.


Source : Syndicat de la Magistrature / 25 janvier 2018

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Mascarpone homme
Vieux clacos corse pas coulant
France
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Inscrit le 19 Sep 2015
4222 messages
Et bé....Bravo les magistrats (sans ironie aucune), pourtant, cette modification des peines encourues allait plutôt dans le sens de leurs alléger le boulot...Mais il y en a au moins quelques uns qui suivent et qui voient bien toute l'hypocrisie et l'injustice sociale de cette histoire d'amendes...Encore une fois la France est complètement à la ramasse en matière de RDR et de prévention...On se réveillera dans 20 ans quand toute la planète (ou presque) aura légalisé le cannabis et que les cannabinoïdes de synthèse auront fait quelques morts de plus...Comme pour les TSO, les salles de conso etc, on sera les derniers des derniers en Europe à réagir intelligemment...A croire que certains hauts placés ont interet à ce que rien ne bouge...vape

Dernière modification par Mascarpone (27 janvier 2018 à  07:04)


Qui pète plus haut que son cul, fini par se chier dessus!
Le pire con, c'est le vieux con, car on ne peut rien contre l'expérience!
Ce qui est bien chez les félés, c'est que de temps en temps ils laissent passer la lumière!

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Cynder homme
: )
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Inscrit le 25 Jul 2017
378 messages
Bonjour!


Perso j'ai toujours vu ces genre de systèmes comme une taxe, et pas autre chose.

C'est un peu comme le droit de rouler, ca te coute forcément des sous/points de permis, le but n'étant à mon avis pas ceux annoncés.

Je préfèrerai voir apparaitre sur ma feuille d’impôt :
- Taxe arbitraire cannabis : 50€
- Taxe arbitraire RC : 150€
- Taxe droit de rouler : X €
- Droit de vivre : XXX €
- M³ d'air inspiré : $

J'aime pas trop les moustachus qui légifèrent pour te faire passer à la caisse en t’expliquant que c'est pour ton bien.

Cette phrase me plait bien :
« Cette mission n’a pas pour objet de réfléchir à la lutte contre la toxicomanie ou la réforme de la loi du 31 décembre 1970 ».

Amicalement

Cynder

"Je suis un pack de bien-pensance."

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thecheshirecat homme
Psycho sénior
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Inscrit le 09 May 2017
839 messages
Wow, je suis très positivement impressionné par la démarche du syndicat de la magistrature, que je ne connaissais pas si pertinent.
A défaut d'être rassurant pour la suite, ça fait réellement chaud au coeur.

Foutu citron.

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psychic homme
Psycho junior
France
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Inscrit le 27 Jul 2017
488 messages
5 ème classe ça m'étonnerait, ce qui est important pour eux c'est que l'amende soit recouvrable sinon elle est sans effet, personne la paiera,  je parie pour une amende de 4 eme classe , donc avec une base de 135 euros avec un maximum limité à 250 euros à peu près

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Rumpelstilzchen
Banni
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Inscrit le 22 Mar 2017
159 messages
Blogs
Non mais ils sont en train de nous expliquer que ce sera pas applicable.
Ces gros branleurs à LREM ne se sont même pas penchés sur un travail en profondeur de la loi.

Travail bâclé, ils vont se vautrer. D'ailleurs je pari que la réputation LREM est en chute libre.

Dernière modification par Rumpelstilzchen (27 janvier 2018 à  19:33)


“Quand je veux estimer le danger que représente pour moi un adversaire, je soustrais d'abord sa vanité de ses autres qualités.”

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Recklinghausen homme
Adhérent PsychoACTIF
France
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Inscrit le 09 Mar 2015
6185 messages
Salut,

Malheureusement ( ? ), le syndicat de la magistrature ne représente pas une majorité au sein de l'Ordre.

J'ai bien l'impression que c'est le ministre de l'intérieur qui va influencer la décision et que les conséquences de la création de cette contravention ne soient nullement la dépénalisation de l'usage de cannabis mais d'une nouvelle marche dans l'escalier de la chasse à l'usager.

La police peut, en plus de la Garde À Vue ET du droit de perquisitions, procéder au dressement d'une contravention.

Le cannabis n'est pas dépénalisé ( et encore moins légalisé mais il n'en a jamais été question ) et l'usager de cannabis reste un délinquant que la police se doit de poursuivre.

Cerise sur le gâteau, c'est toujours les services de la Police/Gendarmerie qui décideraient si l'usager doit être poursuivi par la Justice, à partir de la 2eme interpellation. La consommation reste délictuelle.

Le message est que l'usager peut se faire prendre une fois sans qu'il n'y ait de conséquences directes sur son avenir professionnel... A condition de payer une ( forte ) somme forfaitaire.
Dès lors qu'il se retrouve en récidive légale ( comme l'ensemble des malades qui se soignent à base de cannabis thérapeutique ) ou que l'amende n'est pas payée, l'usager pourrait se voir condamner à de la prison ferme, comme à l'heure actuelle.

La dernière phrase ( l'avant dernière pour être précis ) est inquiétante et montre que la répression à l'encontre des usagers de drogues va devenir encore plus importante qu'elle ne l'est actuellement.

Il n'y a aucune avancé en ce qui concerne le droit de consommer en privé ( il n'est question que de détention/consommation sur la voie publique ) et encore moins sur les personnes qui utilisent le cannabis comme un médicament.

La France irait donc à l'encontre de ce qui se passe dans les autres pays européens... Plus de sévérité pour les usagers de stupéfiants ( et grâce à l'ansm, bientôt de l'ensemble des psychotropes qui sont légaux dans bien d'autres pays de l'Union Européenne, mais c'est un autre débat ).

L'avenir s'assombrit sad


Reck.

L'amour d'une famille, le centre autour duquel tout gravite et tout brille.

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