souffle...
http://www.cyberpresse.ca/actualites/do … ouffle.phpLégalisation de la marijuana en Californie: Washington retient son souffle© 
www.cyberpresse.ca | Publié le 23 octobre 2010 à  05h00 | Mis à  jour le 23 octobre 2010 à  09h28 | Nicolas Bérubé
(Los Angeles) Dans 10 jours, la  Californie votera sur la 
légalisation et la taxation  de la 
marijuana -  le premier référendum majeur sur la question aux États-Unis. Tous les  regards seront tournés vers l'État de la côte  Ouest, dont ceux de l'administration Obama, qui n'entend pas se laisser  mettre en boîte, rapporte notre correspondant. Et les Québécois, que  répondraient-ils si  on leur posait la question de la 
légalisation?
Quand il a ouvert sa boutique de 
marijuana thérapeutique et d'herbes médicinales sur un boulevard chic dans l'ouest de Los Angeles, il y a trois ans, Bill Leahy s'attendait à  recevoir la visite de voisins en  colère.
Après tout, son nouveau commerce proposait plus de 30 variétés de pot à   quelques pas de certains des restaurants les plus en vue de L.A. Un  quartier où 15 dollars achètent un cocktail, 75$ un t-shirt et 300$ un  jeans cousu main.
Au bout de quelques jours, une voisine en colère est venue le voir.
«Elle tenait une boutique d'homéopathie de l'autre côté de la rue, et  était offusquée de voir que j'offrais aussi des produits  homéopathiques», dit-il.
Le 2 novembre, les électeurs de la Californie se rendront  aux urnes pour  élire leur nouveau gouverneur. Ils devront aussi  répondre à  des  questions référendaires, dont celle-ci: «Êtes-vous en  faveur de la  régulation, du contrôle et de la taxation du 
cannabis?»
Appelée  proposition 19, la question constitue l'effort le plus sérieux  jamais  entrepris pour légaliser le 
cannabis aux États-Unis. Si les  électeurs  californiens devaient l'appuyer, le pot deviendrait un  produit dont la  vente, la possession et la consommation seraient  réservées aux adultes  de 21 ans et plus. Bref, le pot aurait  essentiellement le même statut  que l'
alcool.
La 
légalisation du 
cannabis en Californie créerait sans  doute une onde  de choc aux États-Unis, et ailleurs dans le monde. Et la  possibilité  est bien réelle:
52% des électeurs comptent voter pour la  
légalisation,  alors que 41% s'y opposent, selon les derniers sondages.
Washington  prépare déjà  sa riposte. Le gouvernement fédéral, qui tolère  la  
marijuana thérapeutique, a promis d'adopter la ligne dure contre la 
légalisation.
«Nous comptons faire appliquer avec vigueur la loi  fédérale sur le  contrôle des substances, a écrit le ministre de la  Justice, Eric  Holder, à  son homonyme californien la semaine dernière. Et  ce, même si  la vente ou la distribution de 
marijuana à  des fins  récréatives  devaient être permises par les lois de l'État.»
Plus important que le vin
À  l'heure actuelle, il faut une ordonnance du médecin pour acheter du 
cannabis dans des boutiques de 
marijuana thérapeutique comme celle de Bill Leahy. Le système a été mis en place en 1996, également après un   vote des électeurs.
M. Leah se dit en faveur de la 
légalisation du  
cannabis, même si son  commerce serait certain de faire face à  une  concurrence accrue.
«Moralement, j'appuie le projet, dit-il. Il est  temps de cesser de  stigmatiser le 
cannabis. Par exemple, il est  impossible de faire une  surdose de pot. En revanche, plus de 7000  personnes par année meurent à   cause de la consommation d'aspirine aux  États-Unis. Qui parle  d'interdire l'aspirine?»
Une récente étude de  l'État montre que la Californie produit  annuellement pour 14 milliards  de dollars en 
marijuana, soit davantage  que l'industrie viticole.
Si le  pot était légalisé, l'État toucherait jusqu'à  1,4 milliard de dollars annuellement en taxes, note l'étude.
Au cours des derniers mois, les  appuis à  l'option du oui se sont  multipliés. 
Le service Employees International Union (SEIU), qui compte  plus de 700 000 membres en  Californie, appuie la 
légalisation, sous  prétexte que le marché du 
cannabis créera des emplois syndiqués.
La campagne en faveur de la  proposition 19 a récolté plus de 2 millions  de dollars, dont près de  200 000$ donnés par Sean Parker et Dustin  Moskovitz, qui ont participé à  la fondation de Facebook.
En revanche, la quasi-totalité des  services de police de l'État sont contre la proposition 19. Le shérif du  comté de Los Angeles, Lee Baca, a  provoqué la controverse en laissant  entendre que ses policiers  pourraient ignorer la proposition 19, si elle  devait être adoptée par  les électeurs. Jusqu'ici, le camp du non a  récolté moins de 200 000$ en  dons.
Le gouverneur Arnold  Schwarze-negger est contre la proposition 19.  «N'importe quel policier  ou procureur vous le dira: la proposition 19  est une mauvaise initiative  qui créera des problèmes juridiques  monstres, a-t-il dit récemment. Elle va aussi faire de la Californie la  risée du monde.» (Plus tôt ce  mois-ci, Schwarzenegger a décriminalisé  la possession de moins de 28  grammes de 
cannabis, qui devient une  infraction civile n'entraînant pas  de dossier criminel).
Côté médias, l'option du non fait l'unanimité:  26 des 30 plus grands quotidiens en Californie ont publié des éditoriaux  sur le sujet. Tous, sans exception, étaient contre la proposition 19.
Craig  Reinarman, directeur du département de sociologie à  l'Université  de Californie, Santa Cruz, est surpris par la popularité de l'option du  oui  chez la population.
«Il y a quelques mois, j'étais sceptique sur les  chances de voir la  proposition 19 adoptée, explique-t-il. Mais les  derniers sondages sont étonnants. C'est la troisième augmentation depuis  les derniers mois.»
Selon lui, la popularité de l'option de la  
légalisation, éventualité impensable il y a à  peine 5 ou 10 ans, est due  à  la convergence de  plusieurs facteurs.
«La 
marijuana thérapeutique a  ouvert la voie. Les gens voient bien que  la vie continue. Et la  question de l'économie est importante cette  année. Les arrestations à   cause de la 
marijuana, et l'absence de  taxation de l'industrie, sont de  plus en plus vues comme du  gaspillage.»
Une opinion que partage  Lucile Miranda, mère de deux petites filles, et  qui penche en faveur de  l'option de la 
légalisation. Elle compte faire  son choix d'ici le 2 novembre.
«Je ne suis pas en faveur de la consommation de 
cannabis,  mais je crois  que le système actuel coûte cher et ne fonctionne pas,  dit-elle. Des  gens se retrouvent en prison à  cause du pot, ils engorgent  le système.  L'
alcool fait plus de ravages que le pot, et pourtant l'
alcool est légal.»
Oakland, ville verte
Si les  17 millions d'électeurs de la Californie ont à  se prononcer sur  la  
légalisation du pot, c'est en grande partie à  cause d'un résidant d'Oakland nommé Richard Lee.
Lee, 47 ans, est en fauteuil roulant  depuis 1990, quand il a fait une  chute alors qu'il travaillait comme  éclairagiste pour le groupe  Aerosmith. Il a longtemps milité en faveur  du 
cannabis thérapeutique.  Aujourd'hui, il consacre ses énergies à   légaliser complètement le pot.
«Quand j'ai commencé à  vouloir faire  accepter le pot médical, les gens  me disaient «Ça ne marchera jamais, ça  va provoquer le chaos social, la  fin du monde, l'apocalypse, a-t-il dit  cette semaine. Nous avons dû  retrousser nos manches, et nous l'avons  fait.»
Lee a pratiquement réussi à  faire légaliser le pot dans la ville  d'Oakland, où des dispensaires vendent du 
cannabis sans prétendre  qu'il  s'agit d'une substance thérapeutique. Le conseil municipal vient d'ailleurs de donner le  feu vert à  quatre projets de gigantesques serres intérieures pour la culture du 
cannabis. La Ville touche désormais 800 000$ par année en taxes sur le pot vendu sur son territoire.
Pas de scandale
Le plus étonnant dans toute cette campagne, c'est qu'elle se déroule de façon civilisée, voire sans éclats.
L'attention  du public semble être accaparée par la course entre Jerry  
Brown et Meg  Whitman, qui font campagne pour le poste de gouverneur.  Les publicités au  sujet de la Pproposition 19 sont rares. Le débat est  surtout visible  dans les journaux, où différents points de vue sont  discutés dans la  page des opinions.
Pour Craig Reinarman, une victoire de la  proposition 19 ne  déclencherait pas automatiquement une poursuite du  gouvernement  fédéral, malgré l'avertissement du ministre Holder.
«La  quasi-totalité des forces policières en Californie sont des  policiers  municipaux et de l'État, dit-il. Les forces fédérales n'ont  pas les  effectifs pour s'attaquer aux consommateurs de 
cannabis. Il faudrait qu'ils envahissent la Californie, et je ne suis pas certain que Washington veuille choisir cette voie.»
Selon lui, les derniers jours  avant le vote seront cruciaux. C'est à  ce  moment que les opposants à  la  mesure vont faire valoir leurs  arguments.
«Tous les groupes de  sécurité publique sont contre cette mesure, mais  étonnamment, ils ne font pas beaucoup de bruit, dit-il. Les prochains jours seront intéressants. Quoi qu'il en soit, je crois que le vote va  être serré.»
Consommation personnelle
La  proposition 19 vise à  autoriser les gens de 21 ans et plus à   posséder une once de 
marijuana, et d'en faire la culture pour leur  consommation  personnelle. L'initiative prévoit un durcissement des  peines imposées  aux adultes qui vendent du 
cannabis aux mineurs. La consommation en  public serait interdite. Les villes et les comtés seraient libres  d'interdire la culture et la vente de 
marijuana sur  leur territoire.